Premier retour sur le groupe mécanique Shimano GRX 12 vitesses RX820 en usage intensif
Par Test matériel - Commentaires : 13 .
le mardi 16 juillet 2024 11:15 -Premier point étape de l'essai longue durée de cette transmission Shimano GRX RX820 que je vous avais présenté ici.
Un peu plus de 1000 kilomètres pour l'heure, mais uniquement en usage gravel et souvent dans des conditions très difficiles, dont une épreuve cyclosportive, la Traka en Espagne, sur 200 km et 2600 m de D+ avec des conditions mêlant boue et poussière.
Si c'est encore insuffisant pour mesurer la durabilité de certaines pièces, cela me permet tout de même de vous donner mon avis sur ce groupe ici testé en version mono plateau. Retour sur ce groupe dédié à la pratique gravel, son ergonomie, son efficacité, après vous avoir donné mon avis sur les roues GRX RX880.
Ce groupe Shimano GRX 12 vitesses RX820 est donc positionné sur le haut de gamme des transmissions gravel mécaniques.
En version plus abordable, il existe la série RX610 et pour les adeptes des transmissions électroniques, Shimano propose depuis peu la transmission 12 vitesses Di2 RX825.
Des groupes qui ne sont pas des versions route retravaillées, mais bien des transmissions entièrement développées pour les contraintes du gravel.
Cette nouvelle série RX820 affiche une ergonomie bien pensée et des rapports adaptés au gravel pour tous les types d'aventure loin de l'asphalte.
Une transmission mécanique proposée en 3 déclinaisons :
- 1x12 avec cassette 10-45
- 1x12 avec cassette 10-51
- 2x12 avec double-plateau 48-31 et cassette 11-34 ou 11-36
Habitué des double plateaux, pour l'occasion et vu que le marché semble adopter de plus en plus souvent le mono plateau sur les vélos gravel, j'ai donc choisi de changer mes habitudes avec la version mono plateau de 42 dents.
Pour ceux qui ne sont pas habitués, voici les équivalences de développements par rapport à des braquets route avec plateaux 34 et 36 dents (arrondis).
Pédalier | Cassette | Ratio minimum |
Développement approchant avec plateau 36 dents | Développement approchant avec plateau 34 dents |
Mono plateau 42 dents | 10x45 | 0,93 | 36x39 | 34x36 |
Mono plateau 42 dents | 10x51 | 0,82 | 36x44 | 34x41 |
Mono plateau 40 dents | 10x45 | 0,89 | 36x40 | 34x38 |
Mono plateau 40 dents | 10x51 | 0,78 | 36x46 | 34x43 |
Double plateau 48-31 | 11x34 | 0,91 | 36x39 | 34x37 |
Double plateau 48-31 | 11x36 | 0,86 | 36x42 | 34x39 |
La même chose pour les plus grands développements avec des plateaux de 50 et 52 dents (arrondis).
Pédalier | Cassette | Ratio maximum |
Développement approchant avec plateau 52 dents | Développement approchant avec plateau 50 dents |
Mono plateau 42 dents | 10x45 | 4,20 | 52x12 | 50x12 |
Mono plateau 42 dents | 10x51 | 4,20 | 52x12 | 50x12 |
Mono plateau 40 dents | 10x45 | 4,00 | 52x13 | 50x13 |
Mono plateau 40 dents | 10x51 | 4,00 | 52x13 | 50x13 |
Double plateau 48-31 | 11x34 | 4,36 | 52x12 | 50x11 |
Double plateau 48-31 | 11x36 | 4,36 | 52x12 | 50x11 |
On le voit, entre les versions mono plateau et double de ce groupe GRX, on arrive à peu près aux mêmes ratios extrêmes. On aura bien sûr plus de progressivité avec un double plateau que sur du mono plateau où les trous entre chaque développement seront bien sûr plus grands.
Même un 40x10, qui pourrait sembler très court pour certains, est équivalent à un 52x13... de quoi rouler à 50km/h à 100 tr/mn et même 55 km/h à 110 tr/mn.
Bien que Shimano m'ait fourni les deux cassettes 10-45 et 10-51, je n'ai pour l'heure utilisé sur la 10-45, mes terrains de jeux n'étant pas très escarpés.
A ce sujet, attention, le dérailleur arrière propose deux types de chape (que l'on peut facilement changer), une moyenne pour la cassette 10-45 et une longue pour la cassette 10-51. Comme vous le voyez sur le tableau ci-dessous, pour un fonctionnement optimal, Shimano préconise de changer la chape avec chaque cassette.
De mon côté, je n'ai pas encore reçu la chape moyenne, j'ai donc effectué cette première partie d'essai avec la chape longue associée à la cassette 10-45.
Un dérailleur qui reçoit la technologie Shadow RD+ qui est un stabilisateur de chaîne. Le ressort du dérailleur peut ainsi être tendu plus fortement, ce qui évitera les sauts de chaine sur les terrains les plus accidentés. Lorsque le Shadow RD+ et le ressort donc tendu plus fortement, le changement des pignons est légèrement plus dur.
Mais plutôt que de revenir sur toute la technique de cette transmission déjà abordée lors de sa sortie , je vous invite à relire cet article de présentation ainsi que de visionner cette vidéo.
L'essai en conditions exigeantes
Hormis quelques portions bitumées inévitables pour rejoindre mes parcours gravel ou pour des transitions entre deux chemins, j'ai roulé 80% du temps dans des chemins, secs ou nettement plus gras.
Si le plus rude moment de ce test fut la participation à la Traka sur 200 km, j'ai tout de même pas mal jardiné autour de chez moi, aussi bien par temps sec que sous la pluie... et dans la boue, dans une région où l'argile est reine et aime se coller sur tous les composants.
Des sorties allant jusqu'à 90 km en général sur lesquelles je n'ai eu aucun souci. Même le passage des vitesses avec la chape longue et la cassette 10-45, qui n'est pas optimal selon Shimano, se fait sans aucun souci.
Un freinage à la hauteur de la réputation Shimano
Les leviers de freins ont vraiment été pensés pour l'utilisation gravel, tant au niveau de la forme globale des cocottes que des leviers.
Un robuste revêtement antidérapant couvre les manettes pour garantir la prise et la maîtrise, même sous les pires averses, dans les flaques et dans la boue. Un profil arrondi qui répartit la pression sur une plus grande surface de la main et contribue ainsi au confort lors des longues sorties.
Mais les leviers en alu eux-aussi bénéficient d'une forme spécifique. Ils sont relativement larges afin que les doigts puissent bien prendre appui dessus, mais surtout, la finition n'est pas lisse, avec un revêtement légèrement granuleux qui permet une bonne adhérence des doigts même avec de l'eau sur les leviers.
De plus, cette largeur des leviers permet d'avoir un bon feeling même dans les descentes très accidentées.
J'ai quasiment toujours laissé le ressort du dérailleur arrière "tendu" du côté du stabilisateur de chaine Shadow RD+, car il est rare que sur mes sorties, je n'emprunte pas des parties très techniques. Si on détend le stabilisateur, la chaine peut vite avoir tendance à cogner contre les bases et des sauts de chaine pourraient intervenir, même si je n'ai jamais été confronté à ce problème malgré l'absence de dérailleur avant et de patte anti-déraillement.
Revers de la médaille, les montées de pignons demandent un peu plus de force sur le levier droit, sans que cela ne soit vraiment gênant.
Du côté du freinage, on retrouve le feeling Shimano, avec de la souplesse et un freinage puissant et dosable. Pas de bruit de disques qui frottent contre les plaquettes, sauf quand on passe dans des flaques de boue où forcément, il faudra quelques tours de roues pour que le sable et autres impuretés soient délogés.
Partie la plus exigeante de cet essai, la Traka à Gérone sur 200 km et 2600 m de D+. Une édition particulière puisque, si d'habitude, elle a lieu par temps très sec, cette année, la pluie a généreusement arrosé les parcours les jours précédents.
Le parcours était donc une succession de pistes sèches, de parties boueuses, de quelques passages à gué et de pistes sableuses. Secouez pour bien mélanger le tout et vous avez un cocktail détonnant pour mettre à mal la transmission avec toutes les conditions réunies sur une journée.
Près de 10 heures de vélo où tout a souffert, autant le bonhomme que le vélo.... mais sans finalement aucun incident technique à déplorer malgré l'état du vélo à mon arrivée. Plus de 190 kilomètres à pédaler avec une transmission "lubrifiée" par de la boue, on a connu mieux pour le rendement et la durée de vie d'une transmission.
Clairement, le gravel pratiqué dans ses conditions demande à ce qu'un groupe soit vraiment conçu pour un usage intensif contrairement à la route.
Une transmission inarrêtable
Sans surprise, chaine, cassette, pédalier et dérailleur ont été soumis à rude épreuve. J'avais parfaitement lubrifié l'ensemble avant le départ, mais les passages successifs dans la boue, les passages à gué (parfois jusqu'aux moyeux) et la poussière auront eu vite raison de la lubrification.
Au bout de 100 kilomètres, j'ai eu la chaine qui sautait quand j'étais en force sur le plus grand pignon (utilisé dans une côte de plus de 8km). Sur les autres pignons, pas de problème de sauts, mais un bruit qui indiquait clairement que l'huile avait laissé place à du sable.
Fort heureusement, un spectateur bénévole était venu avec force d'huile pour aider les participants. Il a généreusement inondé ma chaine d'huile sans même que celle-ci ne soit nettoyée et tout est rentré dans l'ordre.
Les galets du dérailleur permettent de ne pas stocker la boue. On le voit sur la photo ci-contre, avant nettoyage du vélo, la boue n'est pas restée sur les galets et les dents de ces derniers.
Malgré ce traitement, les passages des vitesses sont restés précis durant toute l'épreuve, même si on voit sur ces photos que la transmission était un mélange d'huile et de boue. Il ne faudra clairement pas s'attendre à avoir une chaine qui dure 4000 kilomètres dans ces conditions.
Et mieux vaudra la remplacer rapidement pour éviter une usure prématurée du plateau et de la cassette. Une chaîne qui est devenue un peu plus bruyante après cette Traka, mais ce n'est guère étonnant vu qu'elle a tourné pendant plus de 8 heures avec un mélange d'huile et de sable.
A mon avis, il faudra la remplacer avant d'arriver à 3000 kilomètres, mais difficile de donner une distance universelle, tout dépendra des conditions d'utilisation.
Quid du mono plateau ?
Mes dernières expériences en mono plateau Shimano, avec cassettes 11 vitesses, m'avaient laissé un sentiment de développements inadaptés en raison soit d'une gamme trop restreinte, soit de trop gros trous entre chaque rapport.
L'arrivée d'un douzième pignon vient clairement gommer ce défaut, tout au moins avec la cassette 10-45 qui est étagée comme ceci : 10-12-14-16-18-21-24-28-32-36-40-45.
Sincèrement, il n'y a vraiment que sur les parties rapides et planes où les passages sur les pignons de 14, 12 et 10 dents montrent de gros écarts de développements où l'on doit faire le choix d'une cadence de pédalage faible plus en force ou d'une cadence peut-être un peu trop élevée.
Sur le reste de la cassette, pas de réel problème et je me suis vite fait à l'utilisation d'un unique plateau de 42 dents. Dans ce cas, même les passages dans des pentes à plus de 14% se fait sans trop de souci avec la cassette 10-45. Je réserve donc la cassette 10-51 pour des sorties gravel dans les Pyrénées.
Notons que la finition du côté de la peinture semble plus solide que sur les transmissions route et notamment le Dura-Ace, puisque malgré des conditions d'utilisation rudes, avec la boue mais aussi des frottements de branches, aucune rayure n'est présente sur le pédalier par exemple.
Même si on voit que ces clichés que la chaussure a frotté contre le pédalier, une fois nettoyé, le pédalier ne présente aucun stigmate.
J'ai par contre rapidement mes manivelles des protections de manivelles Crank Armor de Zefal dont vous pouvez retrouver l'essai ici. Dès ma première sortie avec cette transmission, une manivelle a été marquée par la projection d'une grosse pierre. Un phénomène rarissime sur la route mais très courant sur les chemins.
Pour un investissement de moins de 7 €, on peut ainsi s'assurer de conserver son pédalier en bon état pendant longtemps.
Des leviers à l'ergonomie parfaite pour le gravel
C' est sans aucun doute l'élément le plus appréciable, étant donné que l'on est en contact direct avec ce périphérique durant des heures.
Des commandes conçues pour s'adapter au mieux aux cintres gravel qui sont généralement pourvus d'un flare entre 10 et plus de 20 degrés. Les cocottes présentent une surface avec des lignes en reliefs qui permettent aux mains de ne pas glisser même quand vos gants et ces cocottes sont mouillées ou pleines de boue.
Des cocottes confortables même sur de très longues journées à condition de porter des gants, car mains nues, la texture des cocottes devient assez vite inconfortable. La forme du levier en alu et sa texture sont aussi un net bon en avant et particulièrement adaptés au gravel. Même avec les doigts et leviers trempés, on a toujours une bonne accroche des doigts pour permettre un freinage ou des changements de vitesses francs mais néanmoins dosés. La peinture très légèrement granuleuse permet d'éviter aux doigts de glisser. La forme de ce levier, plane sur l'avant, permet aussi une plus grande surface de contact.
C'est d'ailleurs un concept qui a été repris semble-t-il par SRAM sur le dernier Red AXS avec des leviers plus larges.
Sur les descentes très accidentées où l'on doit fermement tenir le cintre, cette ergonomie des leviers est un vrai plus pour parfaitement doser son freinage.
En danseuse, mains sur les cocottes, on ressent parfois des parties du mécanisme qui dépassent entre le levier et la cocotte, que l'on peut voir ci-dessous en couleur alu.
Comme sur tous les leviers mécaniques de la marque, on peut monter jusqu'à 3 pignons d'un coup avec un ample mouvement de la main. En revanche, la descente se fait pignon par pignon. Des changements de vitesses souples même si légèrement moins précis qu'avec du Di2 (on monte parfois 2 pignons au lieu d'un seul sur les terrains qui secouent) mais parfaits pour du gravel avec une solution qui se révèle plus économique qu'un Di2 sur une pratique qui peut amener à casser des éléments plus souvent que sur route.
Plus que le changement électronique des vitesses, ce qui m'a le plus manqué, c'est la possibilité de changer d'écran sur mon compteur avec le bouton situé sur la cocotte des leviers route Ultegra et Dura-Ace Di2 ou du tout dernier GRX Di2. En gravel, sur des singles ou parties très caillouteuses, si on peut éviter de lâcher les mains pour manipuler son compteur, c'est toujours mieux.
Silence et puissance du freinage
Même recette que sur les groupes route, l'espacement accru de 10% entre les plaquettes et le disque permet de notablement réduire les bruits de frottements, même après des freinages puissants et longs comme dans des descentes raides où l'on veut éviter de prendre de la vitesse.
Il n'y a que les passages dans les ornières, grosses flaques ou passages à gué qui entraînent des bruits de frottements avec l'accumulation de sable et boue entre les plaquettes et les disques qui engendrent du bruit, mais après quelques centaines de mètres, l'évacuation naturelle de ces impuretés ramène le système de freinage au silence.
Si les disques ne sont pas trop usés, les plaquettes commencent de leur côté à être pas mal entamées. Mais comme pour la chaine, c'est plus les contraintes rencontrées durant vos sorties que le nombre de kilomètres qui aura une influence sur leur usure.
En revanche, on est bien content dans ces conditions d'avoir des freins à disques plutôt que des freins à patins, pour avoir un bon freinage en toutes circonstances, mais aussi pour éviter d'user les jantes ! Je n'ose imaginer l'état des jantes, qu'elles soient en carbone ou aluminium, après plusieurs milliers de kilomètres de gravel dans ces conditions.
Mon avis en vidéo
Même si vous avez tout lu jusqu'ici (félicitations), voici un résumé de cet article dans une vidéo présente sur la chaîne Youtube Matos Vélo.
Bilan
Un groupe GRX 12 vitesses RX820 qui se montre léger, surtout dans cette version mono plateau et permet d'arriver à un vélo gravel pesant moins de 9 kg sans pour autant recourir à un coûteux groupe électronique Di2 dont les pièces d'usure (incluant leviers et dérailleur arrière en cas de chutes !) peuvent amener à ce que la pratique devienne très onéreuse si elle est engagée.
La transmission mécanique est pour moi le choix le plus raisonnable en gravel et ce GRX RX820 ne fait que confirmer cela, avec une excellente précision quelles que soient les conditions et des pièces relativement abordables si on doit les changer en cas de chute.
Bien que relativement réticent au début, cette version mono plateau répond parfaitement aux attentes et ce, même si on doit s'engager sur des parcours présentant des pentes raides. Du moment que l'on reste sous les 20% de pente et que l'on n'est pas chargé en mode bikepacking, la cassette 10-45 suffira à la plupart.
Et pour des pentes plus conséquentes, la cassette 10-51, même si elle présente plus de trous, sera un redoutable allié, surtout si on opte en plus pour un plateau de 40 dents.
Alors oui, à 1590 € en prix public, cela reste une somme, mais Shimano propose là une transmission réellement adaptée pour le gravel qui devrait, les prochains mois devraient me le confirmer, être fiable dans le temps si on changer les pièces d'usure dans les temps.
Et il prouve par la même occasion que les transmissions mécaniques n'ont pas dit leur dernier mot et savent se montrer toujours plus précises et fiables.
Photos : Sonam.cc et Matos Vélo
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