Présentation

On ne peut que faire le parallèle avec le tour dernier Specialized Crux, dérivé de l'Aethos. Un vélo qui se veut ultra sportif avec néanmoins la volonté d'être utilisé majoritairement hors bitume. Un vélo de course avec des pneus gravel ! Mais du haut de gamme tout de même, avec des tarifs démarrant à 5000€ pour le kit cadre et 8300€ pour les modèles montés.

C'est ici le modèle équipé en SRAM Force XPLR eTap AXS à 8400€ qui est testé. Forcément une niche car peu de cyclistes sont pour l'heure prêts à mettre une telle somme dans un vélo gravel.

Comme indiqué en introduction, ce Rave SLR puise son ADN dans les Filante SLR (voir test ici) et 0 SLR, deux vélos de route en reprenant le mélange de carbone associé aux polymères liquides utilisés sur ces modèles. Car le cahier des charges pour ce Rave SLR était de proposer un vélo réactif et léger. Un gravel race conçu pour les compétitions gravel qui fleurissent de plus en plus, mêlant portions bitumées et tout terrain.

La filiation avec les deux modèles route est évidente quand on se retrouve devant le cadre. Les plus aventuriers regretteront l'absence de plots de fixation pour des porte-bagages, fixations de sacoches et autres. Mais la philosophie de ce Rave SLR n'est pas dans le bikepacking. Les tubes sont relativement fins et avec un profil aérodynamique.

Le serrage de selle est intégré au tube horizontal avec une selle légèrement aéro qui est esthétiquement superbe mais empêche de monter une tige de selle télescopique. Le Rave SLR offre une intégration complète de la câblerie, avec un système d'entretoises Easy-Fit constituées de deux parties afin de pouvoir être montées et démontées rapidement, sans interférer avec les câbles qui passent entre le guidon et le cadre.

Côté géométries, Wilier a aussi repris celles des modèles route haut de gamme, en les adaptant au gravel avec des périphériques adaptés repris aux vélos endurance et gravel de la marque. En pratique, le Stack et la Reach sont respectivement plus hauts et plus courts que les modèles Wilier équivalents conçus pour les compétitions « route ».

Le Rave SLR permet de chausser des pneus allant jusqu'à 42mm de section, mais il est fourni avec des pneus de 38mm de section de série, ce qui est suffisant pour un gravel polyvalent. Je regrette par contre l'absence d'une protection sur le bas du tube diagonal qui aurait permis de protéger un peu plus le cadre des projections de pierres. Certes, cela aurait été 30g plus lourd, mais à mon avis, indispensable sur ce type de vélo.

La bonne surprise vient du poids. Annoncé à 8kg sur la fiche technique, j'ai pesé mon exemplaire en taille M à seulement 7.6kg ! Même certains vélos de route, équipés de pneus bien plus fins, arrivent tout juste à ce poids.

Ce Rave SLR est proposé en deux coloris, quelle que soit la configuration choisie : sable / vert et noir / gris comme ici, à chaque fois avec des couleurs mattes.

Equipement

Le vélo est équipé du groupe spécifique gravel SRAM Force XPLR eTap AXS sur lequel je ne vais pas trop revenir en détails ici puisque j'ai récemment publié un essai complet à son sujet que vous pouvez retrouver ici : Essai des groupes SRAM Rival et Force XPLR dédiés au gravel

Un monoplateau de 40 dents associé à une cassette 10-44 qui permet de passer partout. Les freins de 160mm seront suffisants pour assurer des décélérations puissantes en toutes circonstances et sur tous les terrains. La version XPLR (Explore) se distingue simplement des versions route avec un dérailleur, un pédalier et une cassette spécifique. Les leviers de freins sont quant à eux identiques, avec donc la même ergonomie et le même fonctionnement pour le changement des vitesses.

Sur ce vélo en déclinaison gravel, Wilier propose son cockpit J-Bar. Au-delà du faible poids (390 grammes annoncés), l'ergonomie est adaptée et offre une bonne capacité d'absorption des vibrations, sans sacrifier la rigidité.

On aime ou pas le design, mais ce cockpit permet l'intégration totale de la câblerie. La partie supérieure n'est pas totalement ronde, dommage, cela empêche la fixation de nombreux accessoires. Il aurait été judicieux, au moins sur la partie centrale où les "bras" de la potence viennent se fixer, d'avoir une partie totalement ronde. Cela aurait permis d'utiliser les fixations de supports compteurs ou lampes plus facilement.

Les roues sont des Miche Carbo Graff, un modèle véritablement conçu pour le gravel. 22mm de large et 30mm de haut pour un poids de 1445g.

La jante est en carbone UD et les moyeux sont en alu usiné CNC avec 24 rayons. Des roues légères pour le gravel, conçus pour l'utilisation de pneux tubeless, ce qui est ici le cas avec des Vittoria Terreno Dry de 38mm de section. Chaque pneu pèse 490g.

Le design de la bande de roulement indique qu’il s’agit ici d’un pneu mixte avec une bande de roulement assez roulante et des crampons latéraux pour l’accroche latérale. Ils taillent ici un peu plus que 38mm de large, puisque j'ai mesuré 40mm. Le Rave SLR permettant de monter des pneus jusqu'à 42mm, il ne reste pas énormément de place. Il faudra en tenir compte lorsque vous changerez de modèles de pneus.

Sur les chemins

Pour avoir pu tester ce Rave SLR et au même moment, le dernier Specialized Crux, à n'en pas douter, ces deux vélos sont conçus pour la même chose, avec les mêmes objectifs, pouvoir passer quasiment partout, mais avec l'objectif de performance avant tout.

Le confort n'arrive pas en premier dans le cahier des charges, même si les gros pneus permettent de largement absorber les trous, cailloux, ... Attention, il n'est pas raide, loin de là, mais la performance passe au premier plan.

Les premiers kilomètres sur route montrent immédiatement que ce Rave SLR n'est pas là que pour la promenade. Hormis les pneus de 38mm, on a vraiment l'impression d'être posé sur un vélo de route, avec le confort en plus. La position tient plus d'un vélo de route que d'un gravel.

Le vélo est hyper réactif. Pour peu que l'on gonfle les pneus correctement (3.5 à 4 bars), on peut sans problème rouler vite sur route, les pneus Vittoria Terreno Dry offrant au final assez peu de résistance au roulement pour des sections de 38mm.

Sa légèreté le rend nerveux dès que l'on se dresse sur les pédales et montre de bonnes capacités même dans les bosses.

Seuls les baquets proposés avec cette version monoplateau seront limitants sur route, du milieu de la cassette jusqu'au bas, où on se retrouve avec de sacrés écarts de développements d'un pignon à l'autre. A ce niveau, le modèle en Shimano GRX Di2, équipé de deux plateaux (46-30 + cassette 11-34) me semble plus adapté et offrir une plus grande polyvalence si vous n'êtes pas attaché au monoplateau. Il est par contre annoncé à 300g de plus.

Sur les chemins, tout dépendra du type de revêtement auquel vous aurez à faire. Sur de la terre dure ou des chemins caillouteux relativement propre, le comportement du Rave SLR diffère peu de la route et se montre à son avantage, nerveux et filtrant bien, mais il faudra tout de même baisser la pression à moins de 2 bars pour avoir du grip sur les parties meubles et sableuses.

En revanche, le Rave SLR montrera ses limites si le terrain devient plus compliqué, à savoir boueux et très accidenté avec de gros cailloux.

Bien sûr, il arrive tout de même à passer partout et ce sont principalement les pneumatiques qui limiteront les possibilités de passer à certains endroits avec plaisir. Si les Vittoria Terreno Dry de 38mm se montrent parfaits par temps sec et sur des terrains secs et pas trop cassants, si la boue s'invite au programme, ils seront vite débordés et l'adhérence sera vite limite, même en descendant à 1.8 bar.

J'ai notamment souffert sur certains passages lors d'une sortie gravel (56km et 1000m de D+ autour de Bruniquel) où deux descentes entièrement recouvertes de gros cailloux qui roulent sous les pneus m'ont donné du fil à retordre. Mais sur ce terrain, il aurait au moins fallu des 42mm pour être bien. La légèreté du vélo n'arrangeant certainement pas la chose ici, le vélo ayant tendance à sauter.

Les passages boueux auraient aussi mérité des pneumatiques plus adaptés, mais cela ne tient pas à la conception du vélo. Dans ces conditions, le modèle Jena (voir test ici) me semble plus adapté.

La transmission, comme évoqué dans mon article au sujet des groupes SRAM Rival et Force XPLR, se montre impeccable de fonctionnement. Que ce soit au niveau du passage des vitesses ou du freinage, tout fonctionne parfaitement, que l'on soit sur le sec ou sous la pluie, que la transmission soit propre ou vraiment sale avec feuilles, boue et sable.

Le plateau de 40 dents est bien adapté et avec cette cassette qui monte jusqu'à 44 dents, on peut sans problème passer des pentes dans la terre qui dépassent les 20% sur plusieurs centaines de mètres. C'est plus sur le plat et faux plats descendants où l'on roule vite que le bas de la cassette se montre compliqué à gérer.

Comme indiqué plus haut, dommage que Wilier n'ai pas prévu de protection sur le bas du tube diagonal pour le protéger des projections de pierres. J'ai à plusieurs reprises entendu de grosses pierres taper, ça ne fait jamais plaisir, même si le cadre ne semble pas avoir souffert, montrant au passage que la peinture semble solide.

Les roues Miche Carbo Graff sont aussi une bonne surprise, dynamiques, légères et solides, avec une belle sensation de roulements.

Si je devais départager le Specialized Crux et ce Wilier Rave SLR (vu que certains poseront sans doute la question), très sincèrement, je serai bien embêté tant les deux vélos sont proches en termes de performances sur des terrains identiques. Peut-être que le Crux serait légèrement devant pour un seul point, la possibilité de monter des pneumatiques jusqu'à 47mm.

Mais pour qui du 42mm suffit, le Wilier Rave SLR se montre hyper réactif et bénéficie d'une intégration complète que le Crux n'offre pas.

Bilan

Ni vraiment gravel (au sens aventurier sur plusieurs jours), ni vraiment vélo de route, le Rave SLR se montre finalement comme un vélo polyvalent, idéal compromis pour ceux qui veulent un vélo de route performant sans se limiter au bitume.

Pour plus de facilités, on pourra avoir deux paires de roues, une pour aller sur le bitume, une autre pour le gravel. Et je comprends mieux finalement le choix de Wilier de proposer ce Rave SLR en mode plus route ou, comme ici, en version plus gravel.

A chacun de faire son choix en fonction de son utilisation. Le Rave SLR, dont le tarif est très haut placé (8300€ minimum), offre finalement deux vélos en un, avec de très bonnes aptitudes aussi bien sur route que dans les chemins. Finalement, un vélo pour tout faire plutôt que deux. Certes, cela impose quelques compromis, mais au final, même en rajoutant une paire de roues, certains pourraient s'y retrouver !