Essai du Lapierre Crosshill CF 8.0, un gravel carbone agile, rapide, de la polyvalence à tous les étages
Par Test matériel - Commentaires : 7 .
le mardi 19 novembre 2024 07:41 -Enfin du gravel carbone chez Lapierre ! Il était temps. Si la gamme Crosshill existe depuis plusieurs années, elle était cantonnée à l'aluminium jusqu'à présent. Un matériau qui n'est pas dénué d'intérêt, surtout en gravel, mais une marque telle que Lapierre se devait d'avoir à sa gamme un gravel en carbone, voilà qui est chose faite !
Un cadre en carbone qui n'est pas sans rappeler le tout dernier Xelius DRS avec ses formes et surtout son concept 3D Tubular dont le but est d'améliorer le confort.
Un vrai gravel aussi à l'aise du côté performance que pour son agilité sur tous les types de terrains... le tout en restant dans une gamme de prix intéressante puisque ce Crosshill CF 8.0 équipé en SRAM Force XPLR AXS est proposé à 5999 €.
Présentation
Bien qu'il partage son nom avec les modèles aluminium de la gamme gravel de Lapierre, ce Crosshill CF est bien une toute nouvelle plateforme.
Un cadre qui se veut ultra polyvalent, mêlant travail aérodynamique sur les tubes, mais aussi nombre de points de fixation pour des garde-boues, des sacoches ou même un porte-bagages. Un Crosshill CF qui vise donc aussi bien la performance pour des courses gravel rapides que des aventures sur plusieurs jours comme ce fut le cas pour Romain, Jiri et Mathieu, 3 athlètes dont le but était de traverser les 5 principales îles des Canaries en 5 jours avec pour seule contrainte, la barrière horaire imposée par le dernier ferry pour le transfert d’île en île. De Lanzarote à El-Hierro en passant par les déserts de Fuerteventura, la jungle de Grand Canaria et le mythique volcan Teide de Tenerife, leur graal se situait après 675 km (et 16000m de D+) d’une course contre-la-montre piégeuse et éreintante dans les chemins ensablés de l’archipel.
Le confort et la filtration sont des éléments primordiaux en gravel. Raison pour laquelle Lapierre a fait de cet élément un axe de travail très important, via 4 choix techniques :
- Un cadre léger, 100% UD SL pour plus d’élasticité et de réactivité.
- Le nouveau 3D Tubular E laisse le tube de selle libre sur toute sa longueur pour plus de flexibilité grâce à un triangle arrière plus grand. Le Crosshill CF, c’est jusqu’à 12% d’absorption des vibrations supplémentaire à 40 km/h.
- Des haubans Flexstays qui apportent de la flexibilité verticale grâce à leur forme elliptique et une double cassure en S sur le haut pour accentuer l’absorption des vibrations.
- Un cadre compatible pour fourche suspendue de 40 mm maximum et pneus de 700x45
Le 3D Tubular de Lapierre est donc bien plus qu'un élément de style ou une signature, c'est une conception clé pour la filtration sur mauvais terrains.
Compatible mono ou double plateau, le cadre nu en taille M sans peinture est annoncé à 1000 grammes et la fourche à 404 grammes.
Côté géométrie, Lapierre a voulu un vélo taillé pour la vitesse et la réactivité, sans mettre de côté la stabilité et une position confortable pour les longues distances. On est clairement en présence d'un vélo beaucoup plus racé que le Crosshill alu.
Un tube supérieur un peu plus court pour une position compacte, un angle de selle beaucoup plus redressé (1.5 à 3.5° selon les tailles) pour un pédalage plus performant et efficace, des bases 5 mm plus courtes (430 mm) pour plus de réactivité dans les relances sans compromettre l’usage de pneus de grosse section (700x45 max) ainsi qu'un boitier de pédalier 4 à 5 mm* plus haut pour s’affranchir de tous les obstacles.
Des pneus pouvant aller jusqu'à 45 mm, ce qui devrait permettre au Crosshill CF de passer quasiment partout. Il est livré avec des pneus de 44 mm.
A noter que ce Crosshill CF est aussi compatible avec une fourche suspendue. D'ailleurs, plusieurs modèles dont ce CF 8.0 sont déclinés avec une fourche suspendue avec l'ajout de la lettre S dans le nom de code.
Le Crosshill CF 8.0 devient donc CF 8.0 S avec sa fourche suspendue avec un tarif supérieur de 1000 € mais qui se dote de la fourche RockShox Rudy Ultimate Race Day 2 ET d'une tige de selle télescopique SRAM Reverb AXS. La masse passe de 8.7 kg à 9.9 kg en revanche.
Un poids respecté puisque j'ai pesé mon exemplaire à 8.8 kg en taille M.
Ce Crosshill CF est aussi doté d'une patte de dérailleur UDH. On remarque que la partie de la fourche au-dessus du pneu est assez haute. C'est voulu, car cela permet au Crosshill CF d'avoir la même géométrie qu'il soit équipé de cette fourche rigide ou d'une fourche suspendue.
Cela donne au Crosshill CF un avant particulièrement haut, appréciable pour les débutants ou les cyclistes peu souples, mais ceux qui recherchent une position plus agressive devront supprimer des entretoises et / ou opter pour un cintre offrant un Rise (réhausse) moins important, puisqu'il est ici de 20 mm.
La base droite est pourvue d’une protection en caoutchouc souple qui atténue les bruits dans les portions techniques et protège la base de toute usure/marque de la chaîne.
Côté coloris, Lapierre reste fidèle à son habitude avec un coloris unique par montage. C'est toujours dommage. Le CF 8.0 est proposé avec ce magnifique blanc nacré avec fourche noire. Dommage, j'aurais trouvé plus esthétique d'avoir aussi une fourche blanche !
Sept modèles composent la gamme Crosshill CF, dont deux sont pourvus d’une fourche télescopique avec 30 et 40 mm de débattement pour un usage plus cassant en montagne.
Fiables et précis en toutes circonstances dans les changements de vitesses rapides, les transmissions électroniques SRAM AXS (XPLR ainsi que le nouveau Shimano GRX Di2) équipent cinq modèles. Ils répondent parfaitement à un usage sportif et performance.
A partir de 2799 € et jusqu’à 6999 €, ce Crosshill CF 8.0 étant quant à lui facturé 5999 €.
Equipement
Sram Force AXS 12v et roues spécifiques au Gravel, les DT Swiss GRC1600, voilà pour le gros des équipements de ce vélo. Je le rappelle, ce dernier est facturé 5999 €, la dotation est donc plutôt honnête.
Du SRAM Force AXS en version XPLR, avec un seul plateau donc de 40 dents associé à une cassette 10-44. Si le dérailleur et les manivelles diffèrent de la version route, tout le reste est identique, à commencer par les leviers dont les cocottes ne sont pas trop hautes même si cela reste bien sûr moins compact que le tout dernier SRAM Red XPLR AXS mais dont le tarif est beaucoup plus élevé.
En attendant une éventuelle évolution de ce SRAM Force XPLR AXS, c'est un excellent choix pour ceux qui veulent un groupe électronique parfaitement adapté à un usage gravel. Ceux qui préfèrent une transmission Shimano Di2 pourront se tourner vers le Crosshill CF 7.0 équipé du Shimano GRX Di2 RX825 avec deux plateaux.
Du côté du poste de pilotage, un ensemble cintre + potence de chez Lapierre, avec une potence en alu et un cintre "gravel bar" spécifique, doté d'un flare de 12°. Un cintre qui, comme vous le voyez, offre un profil spécifique avec une réhausse qui permet d'avoir un peu moins d'entretoises sous la potence sans pour autant avoir le cintre trop bas. Cela s'appelle le Rise. Il est de 12 mm sur les cintres alu et 20 mm sur ce cintre carbone.
La potence aluminium permet un montage semi intégré discret et simplifié pour le passage interne dans le jeu de direction. Ce routing semi-intégré facilite également la maintenance tout en gardant une ligne épurée et des gains aérodynamiques. On le voit en regardant dessous, c'est propre et bien agencé avec une solution qui s'avère au finale plutôt simple.
Du côté de la tige de selle, un modèle Lapierre en alu de 27.2 mm de diamètre (avec un serrage par collier) surmonté d'une selle Fizik Terra Argo.
Pour le train roulant, comme pour le Xelius DRS et en vue d'offrir des roues mondialement connues, Lapierre fait confiance à DT Swiss, avec ici des DT Swiss GRC1600 avec jantes larges et profil aéro. La réputation de DT Swiss, aussi bien au niveau des jantes que des moyeux n'est plus à faire.
Des roues carbone de 42 mm de haut et une largeur intérieure de 24 mm, le tout en Hookless. Des roues qui sont ici équipées de pneus WTB Raddler TCS LIGHT 700x44c avec de gros crampons latéraux pour un bon grip sur toutes les surfaces, associés à des crampons à profil bas au centre du pneu pour une meilleure résistance au roulement.
Sur les chemins
Commençons par le bitume, où ce Lapierre Crosshill CF ne démérite pas. Bien aidé par les pneus WTB qui, malgré leur largeur de 44 mm, offrent un bon rendement avec une partie centrale composée de crampons très bas.
La position est plus haute que sur un vélo route orientée performances, on est plus proche d'un vélo route endurance, avec notamment cette fourche assez haute combinée au Rise de 20 mm du cintre. De fait, on se surprend a être plus souvent que d'habitude avec les mains en creux du cintre.
Le confort est forcément excellent sur asphalte, rien que les pneus de 44 mm de section apportent une filtration plus que suffisante pour ne pas être secoué. Seuls les braquets seront limites, avec des trous assez conséquents entre chaque pignon, mais ce n'est pas une surprise avec une cassette de 12 pignons allant de 10 à 44 dents.
Rien ne vous empêchera de mener bon train avec les copains sur le bitume. Seules le jeu des pancartes sera perdu d'avance, avec un braquet limité et des pneus qui ont tendance à forcément pomper un peu et dissiper de l'énergie quand on se dresse sur les pédales et qu'on envoie plus de 800 watts aux pédales.
Mais passons aux choses sérieuses, car le terrain de jeu du Crosshill CF n'est pas l'asphalte. Au contraire, son terrain commence là où le bitume s'arrête !
Si j'ai bien sûr testé ce gravel sur des terrains très accidentés, il est clairement conçu pour ces pistes de terre mélangées à des cailloux.
Et ici, la conception du Crosshill prend tout son sens, avec une excellente filtration, eu égard que ce vélo est dépourvu de tout système de suspension actif. Mais clairement, le travail sur les haubans 3D Tubular qui permettent une excellente filtration des trous, bosses, cailloux, .....
Une filtration qui dénote d'ailleurs avec la partie avant du vélo si l'on gonfle les pneus à la même pression. Pas de doute, pour un meilleur équilibre dans le confort entre l'avant et l'arrière, il faudra mettre moins de pression sur l'avant que sur l'arrière, au moins 0.5 bar.
Des pneus plutôt surprenants d'ailleurs, avec une bonne accroche sur les flancs, même sur terrains assez meubles voire le sable ou de la boue. Bien sûr, sur terrains très gras, il faudra descendre en pression, mais même dans ce cas, le rendement sur les parties roulantes est très agréable.
Avec une position assez haute sur l'avant, le confort prévaut et comme sur la route, on se retrouve assez souvent mains en bas dès que le rythme s'accélère. Une position haute qui permet d'avoir une excellente maniabilité dans les parties les plus techniques, tout en restant très stable.
La transmission SRAM Force XPLR AXS se montre parfaitement fonctionnelle et ce même dans les situations les plus compliquées. Même la boue ne viendra pas ternir la rapidité et la précision du changement des vitesses.
Le freinage est bon mais manque selon moi de mordant, surtout comparé au tout dernier SRAM Red XPLR AXS. Il faut ici plus de force pour obtenir une forte décélération, mais il faut dire que le dernier Red a placé la barre très haut de ce point de vue là.
En tous cas, jamais durant tout cet essai je n'ai trouvé à redire sur le fonctionnement du groupe et le freinage reste parfaitement silencieux et dosable en toutes circonstances.
Dans les parties les plus accidentées, le Crosshill CF ne démérite pas, loin de là. Bien campé sur ses larges pneus et avec une géométrie très stable, on peut aisément se lancer sur des parcours limite VTT. On regrette juste dans ces moments la moindre filtration sur la partie avant. Et c'est sans doute pour ces parties là qu'une fourche avec suspension pourrait prendre tout son sens, même si cela ajoute 1.2 kg sur la balance. Mais dans bien des cas, ce Crosshill CF offrira le bon équilibre en toutes circonstances.
Bilan
Un gravel carbone qui aura tardé à montrer le bout de ses crampons mais qui se révèle très bien né.
Un vélo polyvalent, qui pourra aussi bien vous permettre de rouler vite sur des courses gravel (sauf peut-être si vous visez un Top 20 !) que des séjours bikepacking.
Un vélo qui met en confiance et permet d'enquiller les kilomètres sur tous les terrains. Un gravel tel que je le conçois, sans gros artifices pour tenter de gommer les aspérités mais néanmoins efficace et joueur pour qui veut de la performance.
Seuls les plus sportifs trouveront la position un peu haute sur l'avant, mais un changement de cintre et une potence posée sur la douille devrait permettre de retrouver un vélo encore plus sportif ! Un vélo bien né, avec un rapport prix / équipement / performances bien placé sur le marché.
Photos : Sonam.cc et Matos Vélo
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