Victoire Véloce Life, un vélo acier ultra confort pour cyclosportifs
Par Test matériel - Commentaires : 12 .
le mardi 6 mars 2018 08:21 -Il est des vélos que vous laissez partir avec encore plus de tristesse que d'autres. A n'en pas douter, ce Victoire Véloce Life en fait partie.
Rouler sur un vélo acier de nos jours, fait partie d'une démarche encore minoritaire. Les occasions sont rares, même pour un testeur, de rouler sur de l'acier. La dernière fois, c'était déjà un vélo Victoire, le Véloce Inox. Un test toujours empreint de curiosité, mais aussi de nostalgie, quand, comme moi et mes plus de 40 ans, on a débuté sur des vélos aciers. Reynolds 531 ou 653 et Columbus SL ou SLX étaient alors ce qui se faisait de mieux.
Avec ce modèle Véloce Life qui bénéficie de toutes les options (ou presque) de chez Victoire, les artisans auvergnats montrent une fois de plus l'étendue de leurs compétences avec un vélo très plaisant à rouler.
Présentation
Ce Véloce Life est, comme son nom l'indique, composé de tubes Columbus Life, la série juste en dessous de la Spirit, la plus haut de gamme.
Ce modèle s'affiche à 7490€ équipé avec son groupe Campagnolo Record et roues Shamal Mille. J'entends déjà râler ceux qui ne voient passer sur Matos Vélo que des vélos très chers. Je vous rassure, un Véloce sur-mesure débute, sans aucune option mais entièrement équipe (groupe Campa Centaur et roues artisanales avec jantes Mavic Open Pro et moyeux Hope RS4, à 4500€. Cela reste une somme conséquente pour beaucoup, mais à ce tarif, le vélo est sur-mesure, ne l'oublions pas.
Vous pouvez d'ailleurs revoir mon reportage au sein de l'atelier Victoire Cycles.
La démarche pour l'achat d'un vélo acier relève toujours d'une longue réflexion, un projet qui se mûrit parfois pendant des années. Souvent un achat réalisé par des personnes de plus de 45 ans désirant, après avoir utilisé de nombreux vélos carbone, retrouver du confort et un vélo différent. Mais il y a aussi les utilisateurs passionnés, qui n'ont même pas 30 ans et préfèrent rouler sur de l'acier.
Le cadre est construit avec une série de tubes Columbus Life. Il s'agit, si l'on excepte la série XCr en inox, de la série qui arrive juste après le haut de gamme Spirit. Au menu, des tubes en alliage de Niobium (en fait, un mélange de Manganese, Chrome, Nickel, Molybdenum et Niobium) avec triples renforts. Les épaisseurs varient entre 0.45 et 0.7mm.
Comme toujours, étant donné que nous sommes sur du sur-mesure, Victoire Cycles peut mélanger différents types de tubes pour arriver au comportement le plus adéquat du vélo. Ici, une douille de direction de 44mm est associée à un tube inférieur bi-oval de 38mm et un tube supérieur de 31.7mm côté douille pour arriver à un diamètre réduit de 28.6mm au niveau de la tige de selle. Cette combinaison devrait assurer une bonne rigidité de l'avant tout en conférant une légère flexion du triangle arrière pour plus de confort.
Le cadre est associé à une fourche carbone Futura Caliper du manufacturier à la colombe.
Les soudures sont parfaitement réalisées, totalement lisses.
Le passage des gaines se fait en interne. Pour cela, Victoire utilise un procédé spécifique qu'ils ont développé eux-mêmes, qui permet d’optimiser le fonctionnement des freins et des dérailleurs tout en supprimant tout risque de bruit parasite.
Chaque câble est guidé dans le cadre par un petit tube en inox de 5 dixièmes d’épaisseur, ce qui permet d'éviter l'écueil d'une maintenance compliquée où l'on perd plusieurs minutes à guider le câble dans le tube.
Comble du raffinement, sur les côtés de la douille de direction, on ne peut passer à côté des butées destinées à protéger la peinture du frottement des gaines. C'est magnifiquement réalisé et beaucoup plus élégant que du plastique collé ou tout autre procédé.
Enfin, un mot sur la peinture. Là encore, il s'agit d'une option, mais celle-ci mérite que l'on s'y attarde. Une peinture métallisée unie du plus bel effet, d'une incroyable profondeur.
Cette peinture multicouche et pailletée change en fonction de la lumière, passant du marron foncé à l’ombre à un orange vif sous la lumière du soleil. Difficile à retranscrire vraiment en photos, mais c'est du plus bel effet. Cette couleur "cuivrée" est du plus bel effet, d'autant que la potence arbore la même couleur.
L'ensemble du vélo détonne forcément par rapport aux cadres carbone actuels dont le diamètre des tubes est relativement conséquent. Là, tout n'est que finesse. Le poids du vélo au complet est de 7.6kg sans pédales. Il est certain qu'à 7500€, ça fait "lourd", mais n'oublions pas que nous sommes sur un acier. Certains carbones n'atteignaient pas ce poids il y a quelques années et on est en présence d'un vélo dont le poids n'est pas le critère essentiel. On pourra toujours se consoler en se disant que ça fait moins cher au kilo qu'un vélo en carbone à 6.5kg :-)
Equipement
Chantre de l'artisanat français ou, à défaut, européen, c'est tout naturellement que Victoire s'est dirigé vers un groupe Campagnolo Record pour ce vélo. Du haut de gamme dont on connaît les qualités, même si je dois avouer (mais ceux qui me suivent depuis longtemps le savent) qu'ergonomiquement, je suis plus à l'aise sur du Shimano. Mais cela n'enlève rien à ce groupe.
Les roues sont aussi en provenance de chez Campagnolo, des Shamal Mille, qui bénéficient d'un traitement céramique de surface de la piste de freinage. 1.46kg la paire.
Enfin, les périphériques (cintre, potence et tige de selle) sont de chez Fizik. La potence est peinte de la couleur du cadre.
De sorte que ce Victoire, s'il est conçu et fabriqué en France, possède plus de gènes italiens (tubes fabriqués en Italie) que Français.
On notera quelques entorses à cette "règle" des composants européens avec le jeu de direction dévolue à Chris King (ce qui se fait de mieux dans le domaine), les pneus Compass Cayuse Pass en 26mm de section, la selle Fabric et enfin, une paire de porte-bidons en titane de chez l'américain King Cage avec seulement 28g chacun sur la balance. On reste dans du très haut de gamme, de l'artisanal.
Sur la route
C'est de l'acier, mais cela n'a rien à voir avec mon dernier vélo acier en Reynolds 531. Les tubes sont différents, la géométrie est différente et en 25 ans, fort heureusement, ça a évolué.
Il faut oublier tous les repères que l'on a habituellement avec un vélo carbone. L'acier a ceci de particulier qu'il agit plus tel un élastique qui va légèrement se déformer pour renvoyer l'énergie, plutôt que comme un cadre carbone qui reste relativement raide. Ce Véloce Life se montre très confortable. Même si des cadres carbone jouent dans la catégorie confort, notamment les modèles dits Endurance, l'acier se montre encore un poil supérieur dans ce domaine, bien aidé par la légère flexibilité des tubes.
Les roues, mais aussi les pneus de 26mm ne sont pas étrangers à ce confort. Les Shamal, très rigides latéralement, offrent tout de même de belles qualités d'absorption verticales. Les pneus Compass sont de leur côté un must. A plus de 80€ l'unité, ils ne pèsent que 183g chacun. A réserver pour les grandes occasions, même si en plus de 700km parcourus en plein hiver et sous la pluie, je n'ai eu à subir aucune crevaison ni même constaté de coupure sur la chape.
Et pourtant, le cadre, comme vous le constatez sur les photos, est relativement compact et sloping, pour avoir des tubes plus courts et donc plus rigides. Seulement 46.5cm pour le tube de selle (d'axe à axe) pour une hauteur de selle à 74.5cm.
Grand confort physique, mais aussi sonore, puisque aucun bruit vibratoire ne vient perturber l'avancée du cycliste.
Ce confort ne se fait pourtant pas au détriment de la rigidité du vélo. Certes, pas aussi rigide (raide ?) qu'un vélo carbone moderne, mais sans doute bien suffisant pour un cycliste moyen comme moi... voire pour des cyclos plus puissants.
Bien que la boîte de pédalier BSA soit quasi minimaliste, on ne la sent pas se défausser quand on se dresse sur les pédales. Mais il y a toujours ce comportement propre à l'acier, un peu élastique. Une sensation déconcertante au début, mais finalement fort agréable sur les longues sorties et encore plus dans les bosses. Peut-être n'est-ce qu'un sentiment, mais on se sent moins "planté" par le vélo, moins en prise.
On ne monte pas plus vite, mais à faible rythme, le vélo reste agréable, vivant. Et s'il sait se montrer docile en montant au train, il ne refuse pas pour autant de se risquer à quelques accélérations. La boîte de pédalier et l'avant du vélo sont très rigides et l'arrière retransmet la puissance sans aucun souci.
En descente, aucune mauvaise surprise. Les roues basses et les tubes fins permettent de ne pas être perturbé par le vent latéral, le vélo reste parfaitement là où on le place, sans le certain flou qui caractérisait les vélos acier (et surtout les fourches acier) que les plus de 40 ans ont connu. La fourche carbone Futura Caliper de Columbus, à seulement 350g, offre la rigidité latérale adéquate pour que le vélo soit précis dans les changements d'angles. Nul besoin de brusquer le vélo, même dans les enchainements rapides, ce Véloce Life s'apprécie et se manie de façon douce.
Après une sortie de plus de 4 heures, le gain de confort est surprenant par rapport à un carbone. Difficile de réellement décrire cela. Pourtant, la position sur ce vélo, très compact, était assurément plus agressive pour moi qu'à l'accoutumée. La douille très courte de 140mm et le pivot déjà coupé m'ont imposé d'avoir une différence de hauteur selle-cintre de 10cm au lieu de 8 habituellement. 2cm plus bas, le cintre m'obligeait à avoir le dos plus horizontal.
Et malgré cela, après 4 heures de vélo, pas de douleurs ni de sensation de muscles mâchés ou courbaturés. Et si, finalement, les vélos carbone d'aujourd'hui n'étaient pas "trop rigides" pour nombre d'entre nous ? Ce n'est sans doute pas pour rien que les marques reviennent en arrière en proposant des tiges de selle de moindre diamètre pour offrir un peu plus de confort.
Bémol pour le traitement de la piste de freinage des Shamal Mille
Si la puissance de freinage offerte par les roues Shamal Mille de Campagnolo est impressionnante, que ce soit sur le sec mais surtout, sous la pluie, en revanche, la durabilité du traitement de cette surface de freinage semble s'user rapidement.
La finition Plasma Electrolytic Oxidation doit garantir un style total black, mais après seulement 5 sorties, voici déjà que ce traitement laisse place à des traces blanches. Si cela n'a aucun effet sur l'efficacité du freinage, le style en prend un coup.
Je n'ai jamais eu à constater une telle usure avec le revêtement Exalith de chez Mavic par exemple. Dommage pour des roues à 1000€ la paire.
Bilan
Et si finalement, c'était ça le vélo ultime ? Ultime, car bien souvent le fruit d'une mûre réflexion, l'achat de l'âge de raison où l'on sait ce que l'on veut, un vélo pour soi (se faire plaisir, avec un vélo adapté à soi) et pas pour impressionner les autres.
Peut-être le terme est-il abusif. En tous cas, ce vélo ne laisse pas indifférent, et le retour à l'acier laisse comme un goût de reviens-y. Mon côté nostalgique de l'époque où je courrai (et où mes capacités physiques étaient finalement bien meilleures qu'aujourd'hui) ou simplement un vélo plus confortable et plus adapté dynamiquement à mes capacités actuelles ?
Retrouvez toutes les infos et les vélos de la marque sur leur site : http://victoire-cycles.com
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