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La création de Victoire Cycles a devancé la ferveur du gouvernement et l'amour des français pour le Made in France, slogan cher à Montebourg. En créant Victoire Cycles, Julien Leyreloup n'avait donc pas en tête de surfer sur cette vague "cocorico", mais plutôt la volonté de renouer avec des cadres réellement sur-mesure, adaptés aux cyclistes et durables.

Et le Made in France semble avoir la côte puisque 30% de la production Victoire Cycles se fait à l'international. Japon, Portugal, Canada.

On le sait peu, mais Victoire a commencé par la production de moyeux et pignons fixes. Julien est issu du BMX (tant professionnellement que par sa pratique), cela n'est donc pas étranger à cette orientation. D'ailleurs, la commercialisation de moyeux et pignons, fabriqués autour de Clermont Ferrand, continue toujours. Et le comble, c'est qu'ils arrivent à produire moins cher, à qualité équivalente, que des produits issus de Taïwan.

L'histoire d'amour entre Victoire Cycles et le pignon fixe n'est d'ailleurs pas terminée, en témoigne cette réalisation récente d'un vélo à "singlespeed" mais avec deux pignons et double plateau.

L'équipe de copains

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Tout le monde n'était pas présent le jour de ma visite, mais les Victoire Cycles c'est :

  • Julien Leyreloup, co-fondateur et gérant, qui est en charge de toute la partie en amont de la fabrication (étude posturale, design, conception) et du montage des vélo
  • Julien Devaux, en charge de la partie commerciale, des achats et des expéditions. Il est le premier interlocuteur de nos clients avant Julien L. Il réalise notamment les devis et cahier des charges en fonction de la demande des clients
  • Romain Thuin, en charge de la fabrication
  • Matthieu Perrusset, en charge de la partie communication/marketing, et des projets annexes à la fabrication de nos vélos, comme le concours de Machine. Il intervient aussi en support à Julien sur la partie développement produit.

En plus de ce noyau, on peut aussi citer Pierre, le développeur web, Stéphane Pouzet alias Pupa Fuzz’T, le graphiste ainsi que Nicolas Joly qui fait les photos d’action. Ils ne travaillent pas directement pour Victoire mais collaborent très souvent avec eux.

L'atelier - show room

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C'est sûr, on est à mille lieux des usines Look de Nevers.

Le local ne paye pas de mine de l'extérieur. Pas d'enseigne, juste une vitrine à travers laquelle on voit quelques vélos.

Et une fois à l'intérieur, retour dans le passé. Ça sent l'artisanat à plein nez. On se retrouve projeté 40 ans en arrière dans une ancienne boutique.

Sur la gauche, les bureaux, neufs. Devant, le système permettant de faire une étude posturale précise. A droite, quelques vélos et cadres exposés.

Et au fond, l'atelier. Un atelier à l'ancienne, dans son jus, comme on n'en voit plus beaucoup en France. A l'ancienne, mais chaque chose à sa place. A droite, une partie du stock de tubes, à côté la machine servant à réaliser l'usinage des tubes (grâce à une vielle machine des années 30 !), un peu plus loin, le marbre, ...

BMX, fixie et bike polo pour débuter

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Ingénieur de formation, Julien a des idées plein la tête. Mais entre les idées et la production, il y a un palier à franchir.

Pour passer des pignons et moyeux à la réalisation de cadres acier et inox sur-mesure, il va falloir tout apprendre. Après l'achat d'un marbre, vient l'apprentissage. Découpe des tubes, soudure, ...

Les débuts se font notamment sur des bike-polo, des vélos simples à réaliser car dépourvus de dérailleurs. Cela permet de se concentrer sur la soudure. Ou plus exactement, la soudo-brasure, mais nous y reviendrons plus loin.

Peu à peu, le savoir-faire des Cycles Victoire se colporte dans toute la France et les premières demandes sur des vélos de route, VTT ou randonneuses affluent.

Inox, acier et soudo-brasure uniquement

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L'entreprise a fait le choix de ne travailler que l'acier et l'inox, les tubes étant mariés via soudo-brasure au laiton (argent pour les petits éléments).

Un procédé qui n'a pas été choisi par hasard puisque la température relativement basse (800/850°) permet de ne pas altérer les tubes en acier qui sont très fins, tout en offrant une soudure très solide.

Seul inconvénient de ce process, il ne peut pas être industrialisé, car nécessite beaucoup de temps de nettoyage. Petit détail qui montre combien l'entreprise est attachée à la production française, même les baguettes de soudure en laiton sont produites en France.

Toutes les soudures sont ensuite polies. Outre un aspect esthétique indéniable, des études menées avec l'IFMA ( Institut Français de Mécanique Avancée - école d'ingénieur mécanique à Clermont-Ferrand) ont permis de constater que les soudures polies sont 30% plus résistantes que les soudures non polies, les contraintes étant réparties sur toute la soudure, évitant la concentration des contraintes sur les arêtes et aspérités.

Trouver des gens capables de braser des tubes de moins de 1mm d'épaisseur s'avère difficile. Aujourd'hui, toutes les écoles de chaudronnerie forment principalement des soudeurs pour l'aéronautique, où les éléments font largement plus de 1mm d'épaisseur. Le travail pour des tubes de 0.5m d'épaisseur n'est pas du tout le même, il faut donc que les personnes se forment sur le tas.

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Victoire travaille essentiellement avec Columbus (Italie), Reynolds (Royaume-Uni) et Tange (Japon). Des noms qui ne seront pas inconnus pour les plus anciens d'entre-nous qui ont sans doute chevauché un vélo conçu à partir de tubes de cette marque (Columbus SL, SLX ou encore Reynolds 531 ou 753 pour les plus connus).

Peu à peu oublié face à l'aluminium et au carbone, l'acier a pourtant su évoluer. Aujourd'hui, on trouve des tubes très fins (jusqu'à 3/10ième de millimètre) avec des épaisseurs variables en fonction des contraintes. Les catalogues des différentes marques proposent des centaines de références de tubes ayant des formes différentes, ce qui permet d'ajuster le vélo autant du côté esthétique que du côté dynamique.

Et comme on est dans le sur-mesure, l'équipe ne s'interdit aucune limite pour satisfaire ses clients. Il est tout à fait possible de mélanger des tubes de différentes marques pour arriver au meilleur résultat possible.

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Chez Victoire, on travaille aussi l'inox, la version la plus prestigieuse de l'acier, sur base de tubes Reynolds 953 ou Columbus XCr.

Des tubes plus rigides que l'acier (environ 46% de résistance à la traction en plus par rapport à un acier standard) et dont la limite élastique et deux fois supérieure à celle du titane. Ce qui se traduit par une conservation des caractéristiques mécaniques plus longue que le titane.

L'inox permet ainsi d'obtenir soit un cadre très rigide, soit, à rigidité équivalente, un cadre plus léger qu'un acier conventionnel, tout en se protégeant des risques de rouille. Ce dernier point permet de conserver le vélo avec un aspect brut, sans aucune peinture. Mais dans ce dernier cas, une couche de vernis (mat ou brillant) est tout de même apposée pour protéger le côté brossé et éviter les rayures.

Mais l'inox est plus complexe à travailler, ce qui engendre un prix assez élevé.

Un travail d'orfèvre qui demande du temps

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L'usinage des tubes et l'assemblage par soudure demande environ une journée. Compter aussi une journée pour le polissage de toutes les soudures (environ 1h de polissage à la main pour chaque soudure).

Forcément, si vous voulez un vélo Victoire Cycles, il va falloir être patient. Compter 10 mois d'attente. Il faut dire qu'avec une production d'environ 100 cadres à l'année, le travail ne manque pas et le carnet de commande se rallonge à vue d'œil.

10 mois, cela peut paraître long, mais c'est un délai courant dans le domaine des cadres sur-mesure réalisés par des artisans. Et le plaisir n'en sera que plus grand lors de la réception de votre vélo.

Des cadres prévus pour durer

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Le choix de l'acier s'est aussi naturellement imposé pour son côté "durable" et sa grande adaptabilité pour toutes les disciplines du vélo.

Durable, car hormis les éventuels problèmes de rouille (mais les tubes sont tout de même traités contre la corrosion), l'acier vieillit très bien. Certes, votre cadre sera plus lourd qu'un cadre carbone, mais il sera aussi plus confortable. Le vélo est adapté au cycliste, ce n'est pas au cycliste à s'adapter à son vélo.

Un acier sur-mesure, c'est un achat pour les 20 prochaines années.

Vous pourrez faire évoluer votre cadre si le cœur vous en dit. Le faire repeindre facilement si vous êtes lassés, changer un tube en cas de chute, retirer les butées pour passer sur un groupe SRAM Red eTap, ...

En parlant de peinture, Victoire Cycles fait appel à 2 sous-traitants locaux, situés à moins de 40km de Clermont-Ferrand. L'un spécialisé dans la peinture poudre (6 couleurs) qui permet de visualiser les soudures par transparence, l'autre, spécialisé dans la peinture traditionnelle liquide, qui permet un choix quasi infini mais qui demande 1 journée de travail... et est donc un peu plus cher.

Des composants triés sur le volet

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Tous les composants qui permettent d'équiper un vélo sont choisis avec soin. Victoire travaille principalement avec des marques comme Tune, Hope, Chris King ou Gilles Berthoud (accessoires pour randonneurs).

Des marques qui ont toutes fait le choix d'une production sur leur territoire. Un aspect qui a son importance, même si bien-sûr, c'est la qualité de ces composants qui prime pour leur sélection.

Victoire travaille beaucoup avec Campagnolo, qui a décidé depuis quelques années d'axer sa stratégie vers les cadreurs sur-mesure. Mais bien sûr, vous serez libre d'opter pour la transmission de votre choix.

Des projets plein la tête

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A l'image de ce cadre équipé de coupleurs ( fabriqués par la société S&S couplings au Etats-Unis) permettant de le ranger dans un sac pas plus grand qu'un sac à roues, Victoire Cycles ne manque pas d'idées.

Plus que jamais, le client est roi et l'équipe fera tout pour que ses désirs deviennent réalité.

L'équipe travaille sur un cadre acier à seulement 1050g, afin de pouvoir satisfaire les cyclistes désireux d'un vélo acier durable, sur-mesure et léger.

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Preuve que le savoir-faire de Victoire est désormais reconnu, les nombreuses collaborations avec des marques de luxe, dont la dernière en date, avec Givenchy.

Dans le spot publicitaire du parfum masculin Gentlemen Only Casual Chic, on peut voir Simon Baker (acteur dans la série Mentalist) chevaucher un vélo Victoire. Un vélo spécialement réalisé pour l'occasion selon les mesures de l'acteur Australien. Le cadre et la fourche font échos au coloris du flacon tandis que les jantes rappellent le liseré de l'étiquette du parfum. 

Trois vélos ont été réalisés en un temps record pour les besoins du tournage et de la promotion du parfum.

Un coup de projecteur qui permet à la marque de se faire connaître dans le monde entier, mais qui permet aussi à l'équipe de réaliser des vélos hors-normes avec des cahiers des charges bien différents de leurs productions habituelles. Souvent, seule l'esthétique compte pour ces publicités.

De quoi laisser libre court à l'imagination débordante de toute l'équipe.

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Combien ça coûte ?

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Forcément, si vous optez pour la version haut de gamme comme ce Victoire Véloce Inox équipé Campagnolo Super Record, roues Bora 35, pédalier Clavicula et périphériques Tune, il faudra débourser un peu plus de 9000€. Le cadre seul étant disponible, en Reynolds 953 ou Columbus XCr, à partir de 2990€.

Mais à ce tarif, vous aurez un vélo acier à 6.7kg !

Sans partir dans les extrêmes, vous trouverez un vélo complet chez Victoire à partir de 3800€. Cela peut paraître cher, mais ce tarif inclus l'étude posturale, les heures de discussions pour bien comprendre votre pratique et vos désirs... et la réalisation d'un vélo unique, sur-mesure. Vous pourrez même choisir la couleur que vous souhaitez.

Un cadre seul en acier Columbus Life débute à 1490€. Vous pouvez retrouver la gamme Victoire ici.

Je roule actuellement sur ce Véloce Inox et je peux vous dire que vous pouvez oublier les préjugés comme quoi un acier serait mou, pas vivant, ... L'acier a évolué... dans le bon sens. Je me suis même surpris à battre quelques records personnels dans des bosses sans avoir une forme excellente. Comme quoi...

Concours de Machines

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Je ne pouvais terminer sans parler du concours de Machines.

Les Cycles Victoire et le magazine 200, organisent cette année la première ré-édition du Concours de Machines. Cette compétition qui se déroula de 1934 à 1949 réunissait les constructeurs français de vélo artisanal, au cours de laquelle ils mettaient à l'épreuve du terrain leur "machine" spécialement conçue pour l'occasion. Elle se déroulera cette année les 1, 2 et 3 juillet à Ambert (63), en marge de la cyclosportive Les Copains, qui nous mettent à disposition leurs parcours, leur organisation et leur public.

Une vingtaine de cadreurs français se réunira lors d'une compétition sur le thème de la randonneuse légère.

Plus d'informations sur la page Facebook de l'événement.

 

 

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