Essai du BH GravelX 4.0, un gravel carbone bien positionné
Par Test matériel - Commentaires : 3 .
le mardi 19 décembre 2023 07:40 -Lorsque BH a présenté son nouveau GravelX en juillet, ce modèle annoncé "pour la compétition et pour avaler les kilomètres" a tout de suite surpris par son dessin et sa solution technique SRS.
Ce n'est pas la première fois que BH fait une rupture esthétique. On aime ou pas, mais au moins, les vélos de la marque s'identifient au premier regard et cela devrait satisfaire - ou pas - ceux qui critiquent les vélos qui se ressemblent tous.
J'ai donc pu tester le modèle 4.0 proposé à 4399 € avec sa transmission Shimano GRX Di2. Un rapport équipement / prix attractif, même si, nous le verrons, certains périphériques pourraient être améliorés. Idéal pour les longues sorties sur mauvais revêtements plus que sur les courses gravel ou la vitesse est de mise.
Présentation
Ce style résolument différent par rapport à la production actuelle n'est pas là que pour faire parler. BH a tenté des solutions techniques innovantes pour accroître le confort de son vélo gravel.
Commençons par la fourche Air Bow Gravel, acceptant des pneus jusqu'à 45 mm de section, qui contribue à la dissipation des vibrations grâce à sa forme incurvée pour apporter plus de confort à son propriétaire. Pas de système mécanique complexe, la marque a préféré ici jouer sur la forme de la fourche et les propriétés des fibres de carbone pour permettre à cette dernière de filtrer au mieux les aspérités des chemins empruntés.
Même si cette solution devrait conférer une filtration bien moins importante que des systèmes hydrauliques par exemple, c'est toujours ça de pris sur de longues distances. Et cela devrait sans doute aussi bénéficier à la tenue de route avec un pneu plus souvent en contact avec le sol.
Mais la particularité la plus visible sur ce nouveau GravelX, c'est son système SRS (Smooth Riding System) sur le triangle arrière. Et je parle bien du triangle arrière au complet, pas uniquement de l'articulation présente au niveau du tube de selle.
L'objectif de ce système et de filtrer avant tout les petites irrégularités pour plus de confort.
Le point de pivot au niveau de la liaison tube de selle / haubans est le plus visible, mais pour avoir une déformation suffisante - même si cette dernière n'est que de 3 à 5 mm environ -, BH a aussi travaillé sur les bases. Elles sont ajourées, pour leur permettre une légère flexion.
Pas d'amortisseur donc, ni de système élastomère, BH joue uniquement sur les propriétés de déformation du carbone. Reste à savoir si cette solution et les seulement 3 à 5 mm de déformation qu'elle apporte en fonction du poids du cycliste, sera suffisante pour apporter une franche amélioration.
L'avantage de cette solution plutôt qu'une tige de selle qui se déforme, c'est qu'elle fonctionne même en danseuse.
Le nouveau GravelX marque l’entrée de BH dans le monde des vélos gravel de compétition et ceci se remarque sur l'ensemble des tubes ainsi que sur l'intégration de la câblerie mais aussi le serrage de selle dissimulé.
Le cheminement interne de l’ensemble des câbles et le système de direction ICR sont eux aussi au rendez-vous. Ici, le choix s’est porté sur un système qui permet également l’utilisation de potences et de cintres classiques pour conférer la plus grande compatibilité possible au cadre.
Alors oui, il existe des systèmes plus intégrés, plus fluides, mais cela se fait bien souvent au détriment des compatibilités. Là, vous pourrez facilement changer de cintre ou de potence.
Par contre, j'aurais aimé que BH prenne un peu plus de soin pour l'intégration du câble Di2 avec le boîtier de jonction qui est relativement mal placé. Un câble plus long aurait permis de placer ce petit boîtier sous la potence par exemple.
Les blocages de roues, dont les leviers sont totalement dissimulés, sont fidèles à cette philosophie d’intégration totale. De même, BH a laissé le côté opposé aux leviers totalement lisse. Alors dans les faits, ça ne change sans doute rien au niveau aéro, mais visuellement, c'est plus joli.
Pour le cadre, il est fait appel à des fibres de carbone haut module combinées à des fibres de carbone Ballistic, un matériau utilisé pour la conception de VTT et spécifiquement choisi en raison de sa résistance élevée aux impacts. Sur la balance, le poids obtenu du cadre n’est que de 1 050 grammes, un chiffre très compétitif si l’on considère que l’ensemble intègre la nouvelle technologie antivibrations SRS.
A tel point que le GravelX perd au passage quelques inserts de fixations pour garde-boue et sacoches. Le triangle avant gagne par contre un emplacement supplémentaire sous la fixation du porte-bidon diagonal pour y fixer une boîte (que je n'ai pas eu avec le vélo) assez grande pour y ranger démonte-pneus, chambre à air et cartouche de CO2. La fourche reçoit des inserts de chaque côté. BH a placé un compartiment. Il n'est pas énorme, mais permettra de ranger une cartouche CO2, une chambre à air ou une petite pompe.
On le voit notamment au niveau de la douille de direction et du tube supérieur, BH a donné à ce GravelX une identité forte, avec des lignes nervurées et parfois anguleuses. Non, impossible de confondre le GravelX avec un autre vélo.
Belle surprise du côté du poids, puisque ce modèle GravelX 4.0 équipé de la transmission GRX Di2 et de roues Vision Team TC30 Disc ne pèse que 9.15 kg en taille MD. Pas mal pour un vélo doté d'un système SRS qui grève forcément le poids de l'ensemble. Les roues en alu accusent à elles seules près de 2 kg sur la balance !
Le tout pour un tarif de 4399 €.
Equipement
Sur ce modèle 4.0, BH a choisi une transmission mono-plateau Shimano GRX Di2. Oui, vous avez bien lu, du GRX Di2 à tout juste plus de 4300 €. Ceux qui comme moi, trouvent la transmission électronique peut-être un peu "too much" en gravel pourront toujours se rabattre sur les modèles 3.5 (GRX mécanique à double plateau) à 3599 € ou le 3.0 à 3299 € en GRX mécanique mono-plateau.
Mais revenons sur ce 4.0 et ne boudons pas notre plaisir de bénéficier du confort et de la facilité de la transmission électronique. Le pédalier FSA Omega Mono de 40 dents trouve ici comme partenaire de chaîne une cassette 11x42. On est donc sur un ratio inférieur à 1:1 qui convient parfaitement aux velléités compétitives de ce GravelX.
Détail étonnant, bien que ce modèle soit en mono-plateau, les deux leviers sont des modèles Di2, avec donc un levier gauche muni des commandes électroniques. Cela offre la possibilité de passer en mode double plateau en changeant uniquement le pédalier et en ajoutant un dérailleur avant.
Mais ce choix reste surprenant en termes d'économies, mais peut-être qu'au final, cela ne coûte pas plus cher au niveau logistique d'opter pour cette solution plutôt que d'avoir des stocks de leviers double et mono !
Cintre et potence sont des modèles alu assez basiques de chez BH. Les plus "graveleux" regretteront sans doute le trop faible flare du cintre. Mais ceux qui veulent plus d'angulation pourront le remplacer facilement par un modèle plus adapté. L'occasion de remplacer aussi la guidoline, qui est plutôt un modèle d'entrée de gamme.
Pour les roues, ce sont des Team TC 30 Disc en aluminium. Des roues d'entrée de gamme, avec un profil de 30 mm de haut pour une masse totale annoncée de 1920 grammes.
Un modèle tubeless ready ici monté avec des Hutchinson Touareg Tan 700x40 mm. Le Touareg vient prendre le relais de l’Overide d’Hutchinson lorsqu’il s’agit de rouler sur des terrains plus accidentés. Les crampons du Touareg sont plus prononcés, plus volumineux et répartis sur des sections plus larges. Le Touareg est conçu pour profiter pleinement de chaque instant hors des sentiers battus tout en conservant un très bon rendement sur la route. Bref, idéal pour du gravel rapide.
Ces pneus étaient montés sur mon vélo en version avec chambre à air. Les disques sont des 160 mm à l'avant et à l'arrière.
L'essai
En montant sur ce GravelX, on devine, rien qu'à sa géométrie et la position, sa proximité avec un vélo de route compétitif.
La monte pneumatique de "seulement" 40 mm va dans le même sens, avec un vélo très à l'aise sur la route même s'il ne bénéficiera pas du dynamisme et de la légèreté d'un vélo de route. En revanche, passé les 30 km/h, il faudra s'employer pour conserver son rythme, on a clairement l'impression de dissiper des watts.
Les pneus Hutchinson Touareg de 40 mm, s'ils sont d'une incroyable efficacité sur le bitume, ne peuvent pas non plus aller contre les lois de la physique. Mais on n'en veut pas pour autant au GravelX, bien que ce soit un "light gravel", ça n'en reste pas moins un vélo gravel, conçu donc pour aller plutôt sur les chemins.
Sur les chemins de terre, il se plaît à merveille. Et si en plus, quelques cailloux, racines ou trous sont présents, il n'en est que plus agréable. Est-ce dû au système SRS ? Sans doute.
Malgré des pneus de 40 mm, on a l'impression d'avoir une section plus large, ou de rouler avec moins de pression que la réalité. Ce n'est pas un système de filtration "flagrant", mais son efficacité est bien réelle, sans avoir cette désagréable sensation de pompage que l'on peut ressentir quand on roule avec une très faible pression.
Ici, on profite sur les parties accidentées de la filtration SRS tout en conservant, sur les chemins plus propres / rapides et sur la route, d'un vélo assez rigide, qui ne devient pas mou. La fourche avant filtre un peu moins bien en revanche. Si l'asymétrie de filtration n'est pas très gênante, il faudra prendre garde à bien ajuster la pression sur l'avant. D'autant que le cintre sans flare et la guidoline très fine n'aident pas au confort.
Dans les montées caillouteuses très raides (plus de 15%), le système SRS semble conférer un meilleur pouvoir de propulsion au pneu arrière, lui évitant de sautiller sur les cailloux. Les quelque 3 à 5 mm de débattement semblent ici faire largement la différence par rapport à un gravel dépourvu de tout système de filtration.
Même sur terrain humide et gras, le vélo offre toujours beaucoup de grip et se montre joueur dans les singles. Il sera en revanche un peu moins joueur quand il s'agit de franchir des obstacles comme des buttes de terre, des rochers ou troncs d'arbres, la faute à un empattement assez grand et un triangle arrière un peu plus lourd que la moyenne en raison de ce système SRS.
Il n'y a vraiment que sur les parties très techniques abordées à grande vitesse que le GravelX marque un peu plus le pas. Les pneus de 40 mm sont dans ce cas la limite basse et ne font pas de miracle.
Le GravelX, grâce à sa géométrie assez longue et sa proximité avec un vélo de route sera très à l'aise sur de longues courses gravel (où la filtration SRS sera un sérieux allié) plutôt que sur de très courtes courses qui demandent beaucoup de nervosité. Mais la faute incombe peut-être aussi aux roues de près de 2kg la paire. Nul doute qu'en grattant sur ce point quelque 500 grammes, le GravelX peut sans doute devenir nettement plus nerveux.
Terminons par la transmission. Je ne suis pas un inconditionnel du Di2 sur les gravels comme je peux l'être sur la route, en raison du coût mais aussi des risques, bien plus grands en gravel, de chute, qui peuvent rapidement abîmer leviers et dérailleurs. Mais si l'on exclue ce côté bassement financier, le confort apporté par l'électronique et presque encore plus flagrant en gravel lorsqu'il s'agit de changer de braquet rapidement.
Des braquets auxquels il faut s'habituer si on est un routier, le mono-plateau impliquant une cassette avec pas mal d'écarts qu'il faudra apprendre à gérer (11-13-15-17-19-21-24-28-32-37-42).
Bilan
Difficile de catégoriser le GravelX plus du côté gravel sportif que du côté gravel aventures pour plusieurs jours (hormis l'absence de quelques inserts de fixation).
Mais au final, on trouve une machine assez équilibrée, capable de passer à peu près partout et qui ravira les routiers par sa géométrie, sa facilité ainsi que son confort. D'autant plus qu'à 4399 €, ce GravelX 4.0 est très bien équipé.
Il mériterait des roues plus nerveuses et légères, mais même dans cette configuration, il y a vraiment de quoi se faire plaisir aussi bien sur route que dans les chemins, le tout avec un dessin résolument engagé et différent des autres vélos.
Photos : Sonam.cc et Matos Vélo
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