Bien que j'ai déjà fait une rapide présentation ici, j'ai maintenant le vélo sous les yeux, je peux donc approfondir les choses.

Ce vélo est composé à la fois d'acier inox, de carbone mais aussi de titane. Que des matériaux nobles :

  • Acier inox pour les tubes du cadre (série Columbus XCR)
  • Titane pour la plaque de douille de direction reprenant le logo original Cinelli
  • carbone pour la fourche

L'acier inox XCR de chez Columbus est concurrent des tubes Reynolds 953, avec tout de même quelques avantages pour les tubes italiens puisque ces derniers peuvent être cintrés et / ou hydroformés, permettant des formes plus sympathiques et la possibilité de faire passer des pneus au delà de 30mm sur certains cadres.

En revanche, les tubes XCR sont rares et leur grande résistance les rend très difficile à travailler. Ce qui justifie en partie le tarif de 3790€ le kit cadre + fourche, le tout étant entièrement réalisé à la main en Italie.

A titre de comparaison, les tubes XCR offrent une résistance mécanique de 1300 Mpa contre seulement 325 Mpa pour de l'alu 6061 ou 550 Mpa pour de l'alu série 7000. 4 fois moins résistant, ce qui oblige bien souvent les fabricants à augmenter fortement l’épaisseur et le diamètre de façon à compenser la solidité. La série XCR est moins rigide que les tubes de l'anglais Reynolds, avec sa série 953 Inox, ce qui devrait permettre d'avoir un vélo moins exigeant.

Cinelli annonce un cadre à 1560g et une fourche à 350g, ce qui donne un ensemble à 1910g. Le vélo complet, en taille M, arrive à 7.9kg. Disponible en 5 tailles (45, 48, 50, 53 et 56) ou sur mesures (à la demande).

Les tubes étonnent par leurs faibles diamètres par rapport à des modèles alu ou carbone. Le tube diagonal mesure 38.4mm de diamètre et se termine en ellipse au niveau de la boîte de pédalier. Seul le tube de selle de 31.6mm de diamètre est finalement assez volumineux.

Le tube de direction de 44mm de diamètre accueille une fourche carbone Columbus Futura en carbone monocoque avec pivot conique 1-1/8” - 1-1/2. Cette dernière permet d'accepter des pneus de 28mm de section voire un peu plus suivant les modèles de pneus et jantes.

Ce modèle est disponible en deux coloris, ce Red Matador qui va du rouge vers l'avant jusqu'au chrome à l'arrière via un joli dégradé, ou un Magic Mirror, largement chromé avec des touches de noir. J'aurai aimé une 3ième option, entièrement chromée.

Afin de ne pas fragiliser les tubes extrêmement fins (0.35 à 0.4mm), vous ne trouverez pas d'intégration de la câblerie, tout se fait en externe comme au bon vieux temps. La boîte de pédalier est au format BSA.

Le système de serrage de la tige de selle est très original, il s'agit du système Fast Back. Pas de collier de selle donc, mais un serrage intégré.

Du côté de la finition, il n'y a pas grand chose à redire, c'est du grand art, avec des soudures parfaitement exécutées. Les pattes arrières sont en acier extra léger 316L soudées TIG et permettent une mise en place facile de la roue. Elles sont surmontées du logo C de Cinelli.

S'il y avait un bémol à apporter, ce serait sans doute sur la qualité de la peinture, qui comportait déjà quelques "éclats". Certes, il a déjà servi à quelques testeurs et a voyagé dans des conditions par toujours optimales, mais à ce tarif, c'est tout de même dommage.

Equipement

Vélo 100% italien oblige, Cinelli m'a prêté ce vélo avec une transmission Campagnolo Record 11 vitesses. Un groupe tout en carbone, à la fiabilité qui n'est plus à prouver.

Cintre, potence et tige de selle sont de marque Cinelli, les modèles NEOS. Contrairement aux apparences, la tige de selle est un modèle alu recouvert d'une fine couche de carbone HM. Elle est surmontée d'une selle Cinello.

La potence est elle aussi en alu forgé, recouverte de fibre de carbone HM et s'affiche à 125g en 100mm de longueur. Seul le contre est entièrement en carbone, construit avec de la fibre HM. Un cintre qui adopte une forme très particulière, tant au niveau de la partie haute que de la partie basse.

La partie haute semble très travaillée ergonomiquement et adopte une partie appelée Palm Zone qui déroute au premier abord. Une partie pas totalement plate ni ronde qui doit permettre de poser les mains de manière très confortable grâce à une largeur accrue. Sous cette partie, on retrouve la sortie des diverses gaines.

La partie basse du cintre est aussi spécifique, avec une courbure réalisée là aussi dans un but de confort.

Enfin, terminons par les roues, des Campagnolo Bullet Ultra avec un généreux profil de 50mm de haut. Elles combinent jante aluminium avec un profil carbone ajouté pour de meilleures performances à haute vitesse.

Des roues équipées de roulements spéciaux CULT et qui au final, ne sont pas si lourdes qu'elles en ont l'air (pour un modèle alu / carbone) puisqu'elles sont données à 1590g. Mais pour qui voudrait un vélo plus léger, il est assez facile d'aller grapiller quelque 300g avec des roues plus légères.

D'autant plus que ces Bullet Ultra sont au prix public de 1660€. Pour à peine 200€ de plus, on peut s'offrir des Bora One 50 à 100g de moins.

 

Le vélo était livré avec des pneus Michelin Power Competition de 25mm de section, mais je n'ai roulé que deux sorties avec, non par mécontentement, mais car j'avais aussi des pneus Veloflex Master en 28mm à tester, alors à y être, autant partir sur du 100% italien !

Sur la route

Chevaucher un vélo en acier est toujours un essai à part dans l'année. D'une, parce-que l'occasion ne se présente pas si souvent que ça, et de deux, c'est toujours une sensation à part.

Même si comme beaucoup de gens de ma génération, j'ai commencé sur un cadre acier (Columbus SL pour moi puis Reynolds 531), il faut oublier tous les préjugés que l'on a sur ce matériau. En plus de 25 ans, il a  largement évolué et propose désormais des qualités indéniables, loin des cadres "mous" des années 80/90.

Ce Cinelli XCR est sans aucun doute un excellent cadre qui ravira les cyclistes qui, comme moi, ne développent pas une puissance hors normes. Il se révèle nettement plus polyvalent, malgré son poids, qu'un cadre en carbone. Il pardonne les baisses de forme (et donc de puissance) tout en se révélant extrêmement dynamique quand on a d'excellentes jambes.

Lors de cet essai, j'ai pris énormément de plaisir, malgré un poids de près de 8kg. Mais bizarrement, je n'ai jamais eu l'impression d'être réellement planté, même en bosse, contrairement à un cadre carbone qui, à 8kg, est souvent très exigeant. Un sentiment curieux et difficile à retranscrire. On n'avance pas plus vite, mais on se sent bien même à rythme peu soutenu.

En descente, le vélo est très précis et on prend plaisir à enchaîner les courbes. Seules les journées les plus venteuses calmeront mes ardeurs, les roues Campagnolo Bullet Ultra ayant tendance à être très sensibles par vent latéral. De plus, je n'ai pas trouvé le freinage transcendant. Loin d'être dangereux, mais c'est grâce à ce type d'essai que l'on se rend compte que certaines roues carbone sont nettement plus efficaces pour s'arrêter, que ce soit par temps sec ou sous la pluie, que des jantes alu.

Si certains vélos s'apprécient surtout à rythme soutenu, ce Cinelli XCR sait donner le sourire en version "tourisme". Jamais je ne l'ai trouvé poussif. Le confort, malgré ces roues à haut profil, est clairement un des points fort de ce vélo. Bien qu'il soit doté d'une tige de selle de gros diamètre (31.6mm), la filtration de l'acier inox est évidente, que ce soit avec les Michelin Power Compétition 25mm qui équipaient le vélo lors de la réception, et encore plus avec les Veloflex Master 28mm, tous deux offrant une largeur réelle de 27mm sur la jante.

Une fois n'est pas coutume, j'ai même apprécié le fonctionnement du groupe Campagnolo Record. Hormis l'ergonomie des leviers qui ne me convient guère (mais qui est un avis purement personnel), le passage des vitesses était parfait du début jusqu'à la fin de l'essai, ce qui ne m'était quasiment jamais arrivé sur les transmissions italiennes. Preuve que la patte arrière est très rigide et que le réglage du groupe parfait. Un vrai plaisir, même si le fonctionnement se montre plus "rude" que chez Shimano par exemple.

Mais cela fait partie de la marque de fabrique de Campagnolo. Aucun doute possible, on sait quand on a changé de vitesse.

Le vélo est dans son ensemble relativement rigide, seule la partie avant est un peu plus souple, mais cela ne m'a aucunement gêné.

Bilan

Une fois de plus, rouler sur un vélo en acier inox est un réel plaisir. Un matériau inaltérable, réparable, prévu pour durer dans le temps et qui se montre nettement moins exigeant physiquement que de nombreux cadres carbone.

Attention par contre, sa géométrie est relativement typée "compétition". Mon cadre, en taille M (50cm axe boîtier pédalier - sommet tube de selle) mesure 54.5cm de long et une douille de direction de seulement 12cm. Il va s'en dire que ceux qui recherchent un vélo plus typé "confort" avec une position plus endurance devront recourir à l'option sur-mesure, qui demande une rallonge de 300€ et fait passer le kit cadre + fourche à plus de 4000€.

Reste son tarif, qui laisse songeur. A 3790€ le kit cadre, même s'il s'agit là d'un produit réalisé à la main en Italie et que le travail des tubes Columbus XCR demande une certaine expertise, je trouve cela assez onéreux, d'autant plus qu'à ce prix, de nombreux artisans proposent du sur-mesure. Mais reste l'image de Cinelli, qui pour certains, vaut bien cet effort financier.