Interview de Michel Lethenet, responsable relations presse Mavic
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le samedi 18 janvier 2014 17:27 -Michel Lethenet est responsable des relations presse et plan médias chez Mavic. Un incontournable pour tous les journalistes qui veulent savoir ce qui se fait de nouveau chez Mavic. C'est grâce à ce monsieur que Matos Vélo bénéficie d'autant d'infos sur les produits Mavic.
Que ce soit VTT, BMX ou route, il connaît toutes les disciplines (qu'il pratique ou a pratiqué) et bien sûr, toutes les spécificités des produits à la marque jaune.
Lorsque je l'ai rencontré pour la première fois sur l'Eurobike 2012, il était tout étonné de voir un blogueur, venu de Toulouse, jusqu'en Allemagne. La première fois qu'il voyait un blogueur en vrai...et apparemment ravi de ma démarche.
Voilà donc le personnage planté....maintenant, place à l'interview pour en savoir plus sur Mavic, ce qui va arriver dans les prochaines années, le rendement des pneus vs boyaux.....et le retour de Mavic avec un groupe ?
1. Bonjour Michel. Pour ceux qui ne te connaissent pas, tu es le responsable Communication de chez Mavic. Je suppose donc que tu as des affinités avec le vélo. Tu es plutôt route ou VTT ?
Pas tout à fait, je ne gère pas toute la communication Mavic. Je m’occupe des relations presse globales et des plan medias. Pour ce qui est du vélo, je suis tombé dedans très jeune comme beaucoup. J’en faisais autour de la maison sur le terrain de motocross voisin et tous les jours pour aller à l’école dès le collège. J’ai ensuite pratiqué le BMX freestyle pendant 10 ans et dès 1986 le VTT. J’ai pris goût à la route bien après quand je suis rentré chez Mavic en 2001 après être passé en magasin de détail, puis chez Cannondale aux Pays-Bas et comme rédacteur en chef adjoint chez Vélo Tout Terrain magazine à Paris.
Chez Mavic, j’ai commencé la route en roulant à la pause de midi à Saint Trivier sur Moignans sur les routes des Dombes dans l’Ain (ndlr : siège historique de l’usine de jantes), puis régulièrement autour d’Annecy et lors de cyclosportives comme l’Etape du Tour ou l’Ardéchoise. Je ne me limite donc pas à un seul genre de deux roues, tout me plait !
2. Mavic a été précurseur dans le domaine du tubeless pour VTT mais ne propose toujours pas de roues tubeless sur la route. Pour quelle raison ?
En effet, la mise au point du système Tubeless VTT apparu en 1999 est basé sur la norme UST (Universal System Tubeless). Ce standard, nous l’avons voulu dès le départ ouvert à tous les fabricants pour rendre jantes et pneus compatibles entre eux et démocratiser au maximum les avantages du système. L’objectif du tubeless est d’apporter des avantages en terme de performance avec pour la route un rendement proche du boyau.
Cependant, l’utilisateur ne doit pas être oublié pour que le passage au tubeless soit perçu comme un réel bénéfice. Que pensez-vous aujourd’hui de la facilité de montage et surtout de réparation en cas de crevaison ? Cela faisait parti des points non négociables quand nous nous étions mis autour de la table pour développer le tubeless route avec d’autres partenaires de l’industrie. Ce critère de commodité n’a pas été suffisamment respecté à notre avis, nous n’avons donc pas souhaité poursuivre l’aventure sans le respect de ces pré requis pour l’instant.
3. Comment un cycliste doit choisir ses roues ? Carbone à pneus ou boyaux, aluminium, profilées, etc.. Le choix est très large et dépendra du budget, mais as-tu des conseils à donner ? Une roue carbone est-elle, comme on le lit souvent, un choix « absurde » ?
Le choix d’une paire de roues carbone n’est pas forcément absurde, tout dépend de la motivation d’achat. S’il s’agit d’un coup de cœur, évidement les critères objectifs ne font pas le poids ! Pour bien choisir une paire de roues, il faut avant tout définir l’usage que l’on en fera (niveau de pratique et fréquence) et sur quel type de terrain, voire quelle discipline et enfin, le budget disponible. Pratique loisir, entrainement, paire de rechange, roues d’hiver, de course, pour le design et la beauté du produit sont les principaux critères qui ressortent.
Ensuite, le lieu de pratique habituelle et son profil de cycliste (rouleur, grimpeur, coursier, cyclo, etc) sont à intégrer.
Schématiquement, si vous habitez une région montagneuse ou non, ventée ou non. Si « abattre du dénivelé » est une activité régulière, il est cohérent de s’orienter vers des roues à faible inertie (jantes basses ou carbone légères). Cette masse en rotation que constituent la jante et son pneu est le principal consommateur d’énergie en côte. Prendre seulement en compte la masse totale ne suffit pas. Inutile de concentrer la réduction de poids au niveau du moyeu et des rayons si la jante « pèse un âne mort ». Grâce à des technologies qui nous sont propres, nous savons fabriquer des jantes aluminium plates plus légères que certaines jantes carbones (cqfd). En plus du poids, plus la jante est haute, plus l’aérodynamisme doit être soigné pour éviter de « lutter » au guidon dans le vent de travers. Ces roues là ne sont pas adaptées aux parcours montagneux mais plutôt réguliers et roulants à vitesse soutenue.
4. Penses-tu que les roues à pneus arriveront un jour à égaler le poids des roues boyaux ?
Oui pourquoi pas, il y a encore beaucoup de solutions techniques à tester et valider. Je ne parle évidemment pas des nouveaux matériaux à découvrir ou à adapter pour une application sur des roues. Nous nous efforçons de trouver les meilleures solutions techniques au travers de nos innovations mais cela peut prendre plusieurs années.
5. Le plus gros « point noir » sur les roues 100% carbone semble être le freinage, notamment sous la pluie. Ne peut-on pas imaginer un revêtement céramique ou un traitement type Exalith sur du carbone ?
C’est un aspect particulier des pistes de freinage sur carbone mais ce n’est pas le seul : la planéité et la régularité des surfaces est également en jeu. Nous l’avons expliqué et grandement amélioré sur les Cosmic Carbone 40 avec notre procédé de cuisson TgMax. Le carbone, contrairement à l’aluminium, concentre la chaleur du freinage et peut atteindre sur une longue descente avec un freinage appuyé presque 250 degrés avec les conséquences que l’on connait sur la déformation de la jante.
Nous avons également réduit de 50% les distances de freinage avec cette roue à jante carbone grâce à ce procédé innovant. Les solutions de dépose de céramique en surface et traitement Exalith dans la masse ne sont pas exploitables à ce jour au vue de tous nos essais sur ce matériau.
6. Le peloton pro est un formidable laboratoire pour vous. Certains coureurs tendraient à utiliser des pneus sur les contre-la-montre en raison d’un meilleur rendement. Avez-vous des retours en ce sens et si oui, les boyaux sont-ils amenés à disparaître aussi sur les courses en ligne un jour ?
Toutes les mesures effectuées démontrent effectivement un meilleur rendement des pneus comparés aux boyaux. Cependant, ce n’est pas le seul critère qui intéresse les coureurs. Le ressenti du sol, la tenue de route en descente ou l’absence de déjantage en cas de crevaison sont également des aspects pris en compte par ces athlètes. Et au niveau du dépannage en course en cas de crevaison, l’assistance course s’en occupe, mais généralement pas lors des sorties club ou autre. Les dizaines de milliers de kilomètres que les pros parcourent dictent leur choix actuel. En revanche, pour un cyclosportif aussi aguerrit soit-il, une paire de pneus haut de gamme est un choix qui se justifie pleinement. Le rendement mesuré sur tous les bancs actuels (dont celui très précis que nous avons développé) confirme qu’il s’agit du meilleur choix autant en termes de performance que de commodité d’usage.
7. Au sujet des coureurs pros, quelles relations entretenez-vous, au-delà du simple sponsoring d’une équipe ?
A ce sujet, je pense que Mavic jouit d’un certain respect dans le peloton. Depuis la création du Service Course en 1972, nombres de coureurs ont bénéficié de l’assistance des hommes en jaune. Nous faisons office d’ange gardien dans bien des cas. La présence continuelle des véhicules et techniciens Mavic dans les plus grandes courses cyclistes mondiales participent à ce respect. Quoiqu’il en soit, nos contrats de partenariat sponsoring comportent toujours un volet de développement et de travail pour le compte de la recherche et de la mise au point de produits plus performants.
8. Vos roues sont compatibles avec le groupe Shimano Dura-Ace 11 vitesses depuis 4 ans au moins. Pour quelles raisons ? Aviez-vous anticipé l’élargissement du corps de roue-libre ?
Le corps de roue libre M10 et maintenant M11 présente en effet des cotes compatibles avec les cassettes 11 vitesses depuis très longtemps. Franchement, nous ne l’avions pas vraiment anticipé. Les cotes répondaient plus à un besoin et à une géométrie de moyeu et des angles des nappes de rayons pour équilibrer la roue arrière. En revanche, l’inverse est peut-être vrai d’avoir créé une cassette compatible avec la majorité des roues en circulation, plutôt que de prendre le risque de ne pas être compatible avec ces que les cyclos utilisent le plus…
9. On parle beaucoup de l’apparition des freins à disques sur les vélos de route. De nombreuses marques ont présenté au moins un modèle route équipé de cette technologie lors de l’Eurobike. Ton avis sur ce système ? Utile ou pas sur la route ?
Le frein à disque est un des composants qui a révolutionné la pratique du VTT alors pourquoi pas en route aujourd’hui ? La problématique n’intègre pas la puissance qui est bien présente mais bien le confort et la souplesse d’utilisation. La modularité et la qualité du toucher feront la différence. Il faut bien sûr éviter de bloquer les roues pour éviter la glissade, ce qui n’est pas évident vu la puissance de l’hydraulique.
L’entretien est très faible (d’expérience) et la performance au rendez-vous, reste donc à résoudre les problèmes de souplesse, de poids et d’intégration. De toutes façons, tout dépend du pilotage. Un cycliste qui anticipe les dangers ne tombe pas quelque soit le type de freins utilisé (ou presque). La solution reste l’ABS mais cela n’existe pas encore. Par ailleurs, les cyclistes les plus aguerris freineront plus efficacement, plus fort et plus tard, ils feront donc de meilleurs chronos (cqfd).
10. Mavic a innové en 1999 avec le groupe électronique Mektronic. Sans doute un produit arrivé trop tôt mais qui a toujours ses adeptes. A l’heure de la démocratisation des groupes électroniques, Mavic a définitivement tiré un trait sur la conception d’un nouveau groupe ?
Mavic a depuis quelques années décidé de se recentrer sur ses forces et savoir-faire. Il ne serait pas raisonnable de chercher à se faire une place sur le marché très concurrentiel de la transmission alors qu’il y a encore tant à faire dans la roue. Nous avons ainsi intégré depuis 2010 les pneus dans la conception de nos produits pour passer un nouveau cap en termes de performance. Et les années à venir vont encore confirmer ce choix. Nous développons en parallèle, l’équipement de la personne de la tête aux pieds et il y a là aussi pas mal d’innovations envisageables.
11. Mavic a toujours innové concernant les roues. Traitement des surfaces de freinage Ceramic, première roue complète, rayons carbone, etc…
Où vont se situer les prochaines innovations ? Gain de poids, autre ?
Aujourd’hui l’accent est mis sur la maîtrise de l’interface jante/pneu. Nous avons déjà démontré avec le concept CX01 sur les roues aérodynamiques CXR 60 et 80 que nous pouvons repousser encore le niveau de performance de nos roues. Ces modèles sont très stables et peu sensibles en vent latéral tellement elles sont aérodynamiques. Les étapes suivantes vont dans ce sens, c’est-à-dire vers toujours plus d’intégration de tous les éléments composants la roue (système roue-pneu).
Le poids fait partie des critères de performance mais ce n’est pas le seul (inertie, rigidité, aéro, fiabilité, rendement, prix…).
Une roue performante constitue un ensemble équilibré de la somme de tous ces critères.
12. Vous avez abandonné le créneau des compteurs et pédales. Pour quelles raisons ?
Nous n’avons pas su atteindre les niveaux de qualité et de performance que nous nous imposons. En effet, nous tâchons de toujours dépasser les critères de poids, prix, fiabilité, performance (…) et parfois, les résultats n’atteignent pas les objectifs escomptés malgré les efforts et les investissements consentis.
Ceci dit, cette année, nous proposons à nouveau des pédales très légères et performantes sur la base de concepts qui ont fait leurs preuves (iClic, large surface d’appui, distance axe/semelle minime, liberté angulaire large).
13. L’équipement du cycliste au sens large (casques, chaussures et textiles) est un nouveau développement de la marque depuis quelques années. Quels sont les points forts de vos produits pour un cycliste qui a désormais l’embarras du choix ?
Nous cherchons à proposer une offre globale de haut niveau pour équiper autant le vélo que le cycliste. Nous essayons en permanence de proposer des produits innovants pour les plus passionnés qu’ils soient coureurs ou aventuriers dans l’âme.
Nous voulons que les cyclistes se sentent appartenir à une communauté qui est au cœur du vélo avec un style propre à Mavic. Nous essayons pour cela d’innover dans les matériaux, textiles, coupes, détails techniques, fonctionnalités, assemblage, style, etc.
Notre gamme large permet de couvrir la majorité des besoins des pratiquants assidus, qui attendent de leur équipement qu’il réponde parfaitement à l’usage intense qu’ils en font, par tous les temps et toutes les températures. Avec quelques 150 produits proposés à différents niveaux de gamme, couleurs, taille, style, niveau de performance, le passionné doit pouvoir trouver parmi nos créations.
Crédit photos : Mavic & Nicolas Jutzi