La genèse de cette équipe et de la Fondation Contador

Inspiré par les difficultés rencontrées par sa famille quand il était enfant, Alberto Contador voulait aider plus d’enfants à vivre le cyclisme; cette fondation oeuvre en ce sens et l'équipe Continentale Polartec Kometa Team en est l'exemple le plus retentissant. Une sorte d'aboutissement pour de nombreux coureurs qui, comme Enric Mas, qui a fait partie de cette équipe, a pu intégrer l'équipe professionnelle Quick Step Floors.

Sans la fondation, peut-être n'aurait-il pas eu sa chance.

L'idée de créer ces équipes est venue lors de la dernière année professionnelle d'Ivan Basso, lorsqu'il partageait sa chambre avec Alberto Contador. iIs ont ensemble évoqué la possibilité de créer une équipe professionnelle World Tour, mais ce projet n'ayant pu aboutir, ils ont décidé de créer ces structures pour aider les jeunes sur le long terme.

Aujourd'hui, 3 équipes sont en fait soutenues par la Fondation, l'équipe Continentale, l'équipe U23 et enfin, l'équipe junior U19. Cela représente pas moins de 22 salariés au total pour tout le staff. Les trois équipes sont encadrées par l'ancien coureur Ivan Basso, qui est le directeur sportif du projet tandis que Fran Contador est responsable de la gestion administrative. Alberto Contador et Ivan Basso, estiment  qu'en unissant leur forces, ils peuvent faire beaucoup pour aider les jeunes à atteindre le niveau professionnel.

Mais faire tourner une équipe Continentale est un véritable challenge.. Comme l'indique Fran Contador, il est difficile de trouver des sponsors à notre niveau, en raison du faible retour, notamment médiatique.

L'équipe est dirigée par deux amis et anciens coéquipiers d'Alberto Contador, Ivan Basso, manager, et Jesús Hernández et est associée à l'équipe World Tour Trek-Segafredo en tant qu'équipe formatrice

Deux sponsors principaux, 3 équipes

L'équipe... ou plutôt les différentes équipes peuvent compter sur le soutien de deux sponsors principaux, Polartec et Kometa, qui apportent le soutien financier nécessaire pour faire tourner de telles structures.

  • Polartec est une marque de tissus techniques dédiés au sport
  • Kometa est une entreprise italienne spécialisée dans la production, la transformation et la commercialisation de viandes et charcuteries

Ces sponsors Polartec et Kometa sont engagés pour trois ans, soit jusqu'à fin 2020. L'équipe peut aussi compter sur de nombreux autres sponsors comme Trek, Vittoria, Rotor, Valtellina ou encore Look pour ne citer que les plus connus.

Gary Smith, CEO de Polartec

« Nous sommes fier d’être partenaire de ce projet pour la troisième année consécutive. Le rôle de la Fondation Contador est incroyable, à la fois pour le cyclisme mais aussi pour la lutte contre les accidents vasculaires cérébraux. Je veux saluer l’engagement de  qui y sont investis comme Alberto et Fran Contador, Ivan Basso et Giacomo Pedranzini. Nous sommes des fabricants de tissus, notre société est en constante évolution et pour nous il y a toujours quelque chose à apprendre pour s’améliorer sans cesse. Ces trois années ont passé très vite, mais j'espère que nous serons toujours là pour les trois prochaines années ».

La patron de Kometa, Giacomo Pedranzini (ci-dessous à gauche) en discussion avec Ivan Basso, est un ami d'Ivan et véritable passionné de cyclisme, d'où son investissement dans ce domaine.

Kometa est une société engagée dans la santé produisant des aliments sains et de bon goût à des prix abordables. Nous sommes responsables envers les générations futures et, avec la nourriture, nous savons que le sport est l'activité qui influence le plus la santé, nous voulons promouvoir une alimentation saine et un mode de vie actif.

J'aime particulièrement l'originalité de ce projet, l'inspiration d'Alberto et d'Ivan et le soutien de la Fondation à d'autres activités, telles que Bikes for Life. Nous voulons faire quelque chose de bien pour la société.

En revanche, lors d'une discussion à table, Fran Contador a soulevé le problème du non retour sur investissement quand une équipe professionnelle engage un coureur. Contrairement au monde du foot où un club doit rémunérer le club formateur, cela n'existe pas dans le cyclisme. Un coureur qui signe un contrat pro reste donc une satisfaction pour le staff formateur, mais Fran souhaiterait que l'UCI adopte une règle permettant un retour sur investissement.

Car sans des équipes formatrices comme Polartec Kometa, sans doute que le vivier des équipes professionnelles serait nettement plus réduit.

Les 3 équipes Polartec Kometa :

Coureurs de l'équipe Polartec-Kometa Continentale : Michele Gazzoli et Matteo Moschetti (Italie), Patrick Gamper (Autriche), Michel Ries (Luxembourg), Awet Habtom (Erythrée), Kevin Inkelaar (Pays-Bas), Wilson Peña (Colombie), Diego Pablo Sevilla, Juan Camacho, Isaac Cantón et Miguel Ángel Ballesteros (Espagne). Directeurs sportifs : Jesús Hernández et Dario Andriotto (Italie)

Coureurs de l'équipe Polartec-Kometa Moins de 23 ans : Tomeu Gelabert, Alejandro Ropero, Jorge Pastor, Daniel Viegas (Portugal), Sergio Hernández, Juan Pedro López, Daniele Cantoni (Italie), Hugo Sampedro, Sergio García, Joan Martí Bennassar, Carlos García, Alejandro Regueiro et Wesley Mol (Pays-Bas). Directeur sportif : Rafael Díaz Justo

Coureurs de l'équipe Polartec-Kometa Junior : Luis Miguel Mendoza, Javier Serrano, Miguel Patiño, Alex Martin, Joan Marc Campos, Juan José Rosal, Manuel Garrido, Carlos Rodríguez, Manuel Jesús Carrellán, Iván Oliver, Alejandro Piquero et Daniel Lopes (Portugal). Directeur sportif : Guillermo Gutiérrez

Un investissement important pour Polartec

L'investissement pour une marque comme Polartec est important. Financièrement bien sûr, mais aussi matériellement, puisque ce sont pas moins de 4000 pièces textiles qui sont fournies au staff et tous les coureurs.

Du textile vélo été et hiver bien sûr, mais aussi tout l'équipement d'après-course avec les survêtements, t-shirts, shorts, ...

Les retours des coureurs sont aussi très importants pour la marque qui peut ainsi développer de nouveaux produits qui seront testés dans les pires conditions avec une utilisation ultra-intensive qui sera plus réaliste que tous les tests de labo.

Comme l'a indiqué Gary Smith, cela permet d'améliorer sans cesse leurs produits. Des tissus que l'on retrouve chez de très grandes marques comme Santini ou Rapha par exemple.

Immersion

Après cette présentation, place à la vie de cette équipe Continentale, durant leur stage de préparation du côté de Bormio, tout au nord de l'Italie du 31 mai au 3 juin.

Une véritable immersion, puisque j'ai pu rouler (un tout petit peu...) avec l'équipe comme en témoigne cette photo où l'on me voit derrière les coureurs en rouge, manger avec eux, les suivre dans la voiture du directeur sportif, ...

Je vais tenter de vous faire vivre au mieux cette expérience unique. Au menu, nutrition, entraînements, récupération.... et plein d'autres choses.

L'encadrement alimentaire et les formations par MAPEI SPORT

Dès le premier soir, j'ai pu manger avec les coureurs, partageant donc le même repas qu'eux. Pas de surprise, nous connaissons quasiment tous la bonne recette, faire le plein de glucides avec des pâtes ou du riz.

On évite le gras ou la viande rouge.

J'ai eu la chance de pouvoir assister à une mini conférence de Andrea Morelli et Matteo Azzolini sur la nutrition à destination des coureurs. Tous deux font partie du Centre de Recherche Mapei Sport, organisme créé en 1995 du temps de l'équipe professionnelle du même nom. Aujourd'hui, Mapeil Sport encadre les sportifs, professionnels ou amateurs, que ce soit au niveau entraînement, étude posturale ou même utrition.

Un rappel pour la plupart des coureurs qui sont déjà habitués depuis longtemps à porter une attention particulière à ce qu'ils ingèrent, mais cela ne fait pas de mal.

Cette mini-conférence a notamment porté sur l'alimentation en course et l'importance de déchiffrer ce qui est indiqué sur les étiquettes des barres ou gels du partenaire Enervit pour ingérer la bonne ration de carbohydrates au bon moment.

Plutôt du solide en début d'épreuve pour passer au fur et à mesure à du liquide (gels) pour une assimilation plus rapide. Il faut compter 60 à 80g de carbohydrates par heure. La maltodextrine est un carbohydrate, compter donc 60/80g par heure d'effort.

Il a aussi été question des gels avec de la caféine. Si ces derniers peuvent avoir un effet stimulant, le pic de caféine n'intervient que 2 heures après leur ingestion, inutile donc de prendre un gel de ce type 10km avant un arrivée !

Bien sûr, un rappel sur l'hydratation a été fait. Si un coureur perd 2 à 3% de son poids en course, c'est considéré comme excessif, le coureur n'a pas assez bu.

Matériel

Impossible pour Matos Vélo de passer à côté de la case matériel. Les coureurs roulent avec les vélos de l'an dernier de l'équipe Trek-Segafredo. On a connu pire comme vélos, avec au choix, Madone ou Emonda en fonction des coureurs et du profil des étapes.

Idem pour les vélos de chrono avec des Speed Concept.

Des capteurs de puissance Rotor permettent aux coureurs de faire un entraînement qualitatif.

Plusieurs mécaniciens permettent aux coureurs d'avoir des vélos toujours en parfait état de marche. J'ai d'ailleurs pu tester le confort d'avoir un mécanicien à portée de main avec une roue légèrement voilée sur mon vélo. En 2mn, le problème était réglé.

Un encadrement de luxe

Parmi le staff de l'équipe, on retrouve donc Ivan Basso, Jesús Hernández ou encore Fran Contador... mais aussi Alberto Contador qui est toujours présent dès que son emploi du temps le lui permet.

Ces anciens coureurs apportent leur expérience, tant au niveau de l'entraînement que des stratégies de course, ce sont de précieux conseils pour des jeunes d'à peine plus de 20 ans qui sont au pied du plus haut niveau.

Bien que ce staff de luxe soit composé d'anciennes stars du peloton, les coureurs sont loin d'être intimidés et semblent avoir la même relation qu'avec n'importe quel entraîneur ou directeur d'équipe. Bien sûr, les coureurs ont une oreille attentive aux paroles d'Ivan Basso quand ce dernier vient leur prodiguer quelques conseils après le petit-déjeuner.

Forcément, on gagne du temps quand on peut bénéficier des conseils d'un tel encadrement qui a connu le plus haut niveau.

J'ai pu surprendre une discussion entre Ivan Basso et l'erythréen Awet Habtom qui a duré plusieurs minutes. Sans connaître le contenu de leurs échanges, le moment semblait très important pour Awet Habtom, sans doute une discussion cruciale au sujet de son avenir.

Entraînements en haute montagne

L'équipe n'a pas choisi Bormio par hasard pour ce stage d'entraînement. Idéalement située au pied de cols mythiques comme le Stelvio, le Gavia ou un peu plus loin le Mortirollo, il est aussi possible de faire quelques entraînements en vallée, pour faire par exemple des journées plus soft et des entraînements sur les vélos de chrono.

Des sorties en montagne allant jusqu'à 5 ou 6 heures. Quand on m'a indiqué que j'allais rouler avec eux, je me doutais bien que du haut de mes 41 ans et mon modeste niveau, je n'allais pas pouvoir rester dans les roues bien longtemps.

D'autant que la première journée, il a fallu attaquer par une bosse de 2km à 5% de moyenne. Pas énorme, mais quand les jeunes de moins de 23 ans grimpent tranquillement en discutant, moi, je suis déjà quasiment à bloc. Sagement, je lève le pied pour attendre d'autres journalistes, je sais de toutes façons que je ne pourrai pas suivre durant les 5 heures prévues à ce rythme.

Heureusement, il y aura d'autres sessions plus soft pour que je puisse rouler avec eux. Les journées sont rythmées par les sorties de 9h à 14h maxi, puis repas et l'après-midi est dédiée à la récupération. Et ce, pendant plusieurs jours, un véritable entraînement de haut niveau, mais pas étonnant, puisque quelques coureurs sont ensuite partis sur le Baby Giro, le Tour d'Italie réservé aux moins de 23 ans qui se courre en 10 étapes. D'autres coureurs sont eux partis sur le GP de Lugano.

Lors d'une sortie, j'ai pu suivre les coureurs dans la voiture d'Ivan Basso, sur une courte sortie de récupération de 2 heures.

A la faveur d'une pause café (élément indispensable en Italie) dans la montée du Gavia, dans le village de Santa Caterina, le jeune coureur Daniele Cantoni explique que les semaines d'entraînement peuvent atteindre 30 heures.

Toutes les données des coureurs sont téléchargées sur une plateforme et décortiquées par un entraîneur pour adapter l'entraînement afin d'atteindre les pics de forme aux moments voulus et éviter tout sur-entraînement.

Les coureurs sont parfaitement encadrés et le staff, que ce soit Ivan Basso ou les autres sont toujours très présents auprès des coureurs, que ce soit avant, pendant ou après l'entraînement.

Plus que les résultats, c'est l'état d'esprit qui semble compter pour cette équipe Polartec-Kometa. Tous les coureurs ne passeront sans doute pas professionnels, mais ceux qui en ont les capacités bénéficient là d'une structure professionnelle idéale pour franchir les paliers de façon régulière, sans se brûler les ailes.

Une équipé qui respire réellement la bonne humeur et qui me rappelle furieusement mes années cadets et juniors avec les copains de club... mais bien sûr avec un tout autre niveau pour ces jeunes au potentiel hors-normes.

PS : le voyage ainsi que l'hébergement pour réaliser ce reportage ont été payés par POLARTEC.